lors ? Personne pour dire haut et clair qu’aujourd’hui « La lettre à un jeune poète » de Rilke sent le pâté, pour ne pas dire le cadavre ? Je suis retombé sur cette charogne au détour d’un commentaire adressé par « La licorne » à la suite d’un article d’Emmanuel Prunevieille * relatant sa visite d’une exposition des oeuvres de Bob Vershueren** et de sa rencontre avec celui-ci.
La posture développée par Rilke, on la connaît depuis les Romantiques : si vous ne mourriez pas de ne plus écrire, c’est pas la peine de continuer. Là, c’est écrire mais on peut avancer sans grand risque de se tromper que dans l’esprit de Rilke, cet autisme vaut pour tous les arts. Il faudrait donc se centrer sur soi seulement et rester sourd aux bruits du monde, tous susceptibles de parasiter cette quête narcissique. Ce qu’ommet Rikle - peut-être n’ose-t-il plus, mais d’autres avant lui l’ont fait - c’est de fixer l’objectif de cette ascèse, qui n’est pas l’oeuvre, mais Dieu, ou si vous préférez, le sacré, le grand mystère qui nous dépasse, le grand tout et hop, le grand Manitou.
Attention, je suis persuadé AVEC Rilke, qu’écrire procède d’une nécessité vitale, comme peindre, jouer de la musique etc. C’est son renversement de perspective que je trouve pervers. Plutôt que de se demander si on mourrait de ne plus écrire - amis masochistes bonjour - pourquoi ne pas constater qu’écrire nous fait vivre, mieux ? Pourquoi aller se chercher autour du nombril, dans le splendide isolement d’une tour d’ivoire, une ligne directe avec Dieu quand ce qui nous dépasse, ce qui est infiniment plus grand et plus précieux que notre petite personne, c’est l’espèce, l’humanité, les autres, tout ce à quoi nos oeuvres ajoutent et vers qui elles sont tournées ?
Chers poètes vivants, ne retenez des vieux cons que leurs oeuvres. Le reste est mort et devrait être enterré avec eux.
Jimidi
* Vers lequel m'a fait rebondir l'article de Lou "Les lumières effaceront les ténêbres"
** L’enjeu - galerie du Fenil, au château - 41150 Chaumont-sur-Loire - jusqu’au 3 novembre 2010