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23 avril 2011 6 23 /04 /avril /2011 11:31

 

  Lettrine--E-quixle---Bleu-Mikla--Le-canet-de-Jimidi.jpg

 

 

motionnellement, l’écriture expose l'auteur à des forces l’attirant en lui, du côté de l’intériorité, du recentrage, de l’introspection, mais elle l’expose également à des forces le poussant au contraire vers l’autre, l’extérieur, l’en-dehors.

 

La pensée, comme langage plus ou moins articulé, adressé silencieusement à soi-même, attire vers l’écrit confidentiel, comme s’il s’agissait, finalement, par l’intermédiaire d’un stylo ou d’un clavier, de déverser un trop plein de langage, de le fixer sur une mémoire moins volatile. Ce faisant, l’auteur découvre qu’il y a loin de la pensée à l’écrit. L’écrit réclame une formulation plus précise, plus linéaire, plus articulée quand la pensée se satisfait très bien de raccourcis, d’ellipses, d’associations avec des images visuelles, émotionnelles, olfactives, sonores et de cheminements en étoile, en allers-retours, ou erratiques.

 

Le texte, par les contraintes qu’il impose, par cet irréductible écart avec l’idée qu’on en avait, apparaît alors à la fois comme un point d’appui pour revenir à la charge de ce qu’on voulait dire, le préciser, le clarifier, l’organiser, mais il apparaît également comme un objet distinct de soi, communicable, ayant en tant que tel son existence et son autonomie.

 

Dès lors chaque texte témoigne de la résultante singulière des forces contraires s’exerçant sur son auteur : celles le centrant sur lui, celles le poussant vers l’Autre. Mais chaque texte s’inscrit également dans l’histoire personnelle de cet équilibre.

 

Et les blogs, dans tout ça ? J’y viens.

 

J’y pensais devant l’insuccès retentissant de Scribulations.fr, ou de son très, très lent démarrage, si tu veux voir le verre plutôt à moitié plein. Cette plateforme voulant retrouver les conditions dont nous avons été privées par la disparition des groupes MSN, s’inscrit dans un contexte qui n’a plus rien à voir avec celui de la fin des années 90, début des années 2000. On peut comprendre rétrospectivement que des auteurs, mus par les forces contraires dont je parlais, aient trouvé sur ces forums, ces échanges avec d’autres vers lesquels les poussait leur écriture, puisqu’en gros, il n’y avait rien d’autre, du moins sur le Net. Mais aujourd’hui, les blogs peuvent apparaître comme la formule idéale permettant de réaliser l’équilibre entre une écriture centrée sur soi et sa très large exposition à la lecture de l’autre.

 

C’est totalement illusoire, bien sûr, mais nous aimons (et moi le premier) nous bercer d’illusions. La première illusion c’est celle d’être lu, mais celle-là ne m’apparaît pas comme très problématique. Je peux me tromper, mais il me semble que pour un auteur, une fois son texte détaché de lui, bouteille à la mer ou deux cent mille exemplaire vendus, ça n’a pas grande importance. Ce qui compte, c’est les retours, les critiques, les avis et surtout la petite étincelle dans l’oeil de son lecteur, n’y en aurait-il qu’un.

 

La deuxième illusion, très préoccupante celle-là, c’est de croire qu’on peut tout écrire sur un blog perso. Or tous ceux et celles qui tiennent où on tenu un blog le savent bien : petit à petit, son écriture pose ses propres exigences. Il me semble avoir été clair avec cette idée mais j’insiste : pour moi, toute écriture impose son propre cadre. Je le dis autrement : on n’écrira pas pareil un article pour une revue papier, un poème pour un recueil, un mémoire universitaire, un rapport pro, un roman etc. Aussi, que ce soit au départ ou à l’arrivée, on se trouve largement autant contraint par la forme même du « carnet électronique » que par n’importe quelle autre. Il n’y a pas d’écriture libre, il n’y a que des écriture cherchant la liberté.  

 

Le blog offre bien DES libertés, mais pas toutes et en raison même de son exposition publique, même si nous ne sommes pas lus (nous pourrions l’être) je crois qu’il impose une forme beaucoup plus journalistique que littéraire.

 

Du coup, et c’est là que je voulais en venir, ni l’écriture au plus proche de soi, ni la communication intime avec celle-ci n’ont en moyenne leur place sur nos carnets. Si je ne me trompe pas trop, les auteurs, du moins ceux engagés par leur écriture dans une quête littéraire, dont je ne suis pas loin de penser que l’écriture en est à la fois le moyen et l’objet, ceux-là écriront et publieront toujours en dehors de leur blog et ceux-là chercherons toujours un lecteur, un vrai. C’est à ces écritures et ces lectures se cherchant que voudrait inviter Scribulations.fr.  

 

commentaires

H
<br /> <br /> Même sur les blogs, l'écriture sera régie par la volonté du bloggeur. Tu auras le bloggeur cherchant à tout prix à augmenter ou à maintenir son nombre de<br /> lecteurs et ainsi écrira toujours dans cette optique, un peu comme un réalisateur cherchant à être sélectionné pour le Festival de Cannes et le bloggeur écrivant d'abord pour lui et pour se faire<br /> plaisir quitte à destabiliser son lectorat et à perdre des lecteurs.<br /> <br /> <br /> C'est la raison pour laquelle tu trouves des blogs avec des articles courts, des débuts d'articles où il faut cliquer sur un lien pour lire la suite, des<br /> blogs avec une ligne éditoriale stricte. Puis t'a ceux qui écrivent en fonction des envies et du jour.<br /> <br /> <br /> Je peux t'assurer qu'écrire tout et n'importe quoi n'attire pas le chaland et encore moins les rétrospectives sur le cinéma de genre longues comme un jour<br /> sans pain, sans vin et sans boursin. Mais comme je considère toujours qu'un écrivain, celui qui a besoin d'écrire, est un être égoïste et qu'il le fait déjà pour son propre besoin et son propre<br /> plaisir... cela explique pas mal de choses.<br /> <br /> <br /> <br />
Répondre
J
<br /> <br /> Intéressante contribution !<br /> <br /> <br /> <br />
L
<br /> <br /> Un lecteur-un-vrai : d'accord, mais c'est quoi-qui ?<br /> <br /> <br /> Les blogs, carnets ou sites nous incitent à SURVOLER, à toute allure. On ne lit plus, on saute d'un paragraphe à l'autre, d'un article à un billet. L'es gens qui écrivent le savent bien :<br /> l'article long a peu de chances d'être lu dans sa totalité, encore moins d'être relus. D'où l'abondance de textes de + en + courts. Le lecteur-le-vrai existe-t-il encore ?<br /> <br /> <br /> Et l'auteur-le-vrai, si on en parlait ?<br /> <br /> <br /> (excuse les points d'interrogation, j'apprécie ton article ci-dessus ; je ne cherche pas à t'agresser, seulement à faire avancer le sche-mi-le-blink ... )<br /> <br /> <br /> <br />
Répondre
J
<br /> <br /> Un lecteur, un vrai, comme tu l'as défini "en creux", c'est quelqu'un qui ne survole pas, qui lit, qui ne saute pas d'un paragraphe à un autre, d'une article à un billet, du moins pas tout le<br /> temps. Et l'auteur, le vrai, c'est donc celui qui n'écrit pas seulement à la surface, du moins pas tout le temps, non ?<br /> <br /> <br /> <br />

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