Quarante ans, plutôt bien de sa personne, mariée avec une femme intelligente et belle, ministre de la défense d’un pays riche et influent, tout pour devenir un jour calife à la place du calife, et pris la main dans le sac à bidonner sa thèse de docteur en droit. Fascinant.
Oui vraiment, fascinant, à plus d’un titre.
Bidonner une thèse. On ne reproche pas à notre ex-ministre d’avoir utilisé un nègre. Ce serait mal venu dans un monde où ceux que les anglo-saxon appellent des écrivains fantôme, rédigent des livres de souvenir, des essais politiques, des romans et tous les discours de nos hommes politiques à tour de bras. Non, on lui reproche d’avoir plagié, c’est à dire piqué ça et là le travail d’autres pour se l’approprier sans les citer. Perso, j’ai une hypothèse. Pour une raison qui m’échappe, notre ex-ministre veut être docteur en droit. Il n’a bien sûr pas une seconde à lui pour travailler cette thèse vu, c’est le cas de le dire, son agenda de ministre. Il est déjà entouré d’une foule de collaborateurs, qui font l’essentiel de son travail. Il cherche donc à en embaucher un de plus, chargé de lui rédiger sa thèse. Il le choisi lui-même, ou délègue ce choix, mais je pense qu’il trouve quelqu’un de capable. Son seul tors est de le payer d’avance et beaucoup trop. Du coup, ce fantôme là, tout à fait capable mais ayant autre chose à faire que de bosser de nouveau une thèse alors qu’il en a déjà au moins trois, embauche à son tour quelqu’un de beaucoup moins capable, ou moins honnête, ou carrément manipulé par le camp politique adverse. Ce troisième larron bidonne, soit qu’il ait une grande habitude en la matière, soit qu’on lui ait fortement conseillé de le faire et hop, c’est livré. A l’arrivée, notre ministre ne pourra évidemment pas reporter la faute sur quelqu’un d’autre puisqu’il lui faudrait alors avouer qu’il n’a pas écrit cette thèse lui-même, ce qui revient de nouveau à voler le travail de quelqu’un d’autre, même s’il s’agit d’un travail de peu de valeur. Coincé.
Docteur en droit. C’est fou cette vanité de ceux qui ont déjà beaucoup, d’en avoir toujours plus ! Là, c’est une vanité assez particulière puisqu’elle vise un titre, un honneur, que l’intéressé se proposait tranquillement d’usurper. Parce qu’une chose est bien claire, même si au final la supercherie n’avait pas été éventée, l’intéressé, lui au moins, savait qu’il n’avait rien fait pour mériter le titre universitaire obtenu. Voyait-il ça comme une récompense acquise dans un domaine pour des services rendus dans d’autres, usant alors d’une sorte de mécanisme de légitimation par compensation ? Ou, beaucoup plus inquiétant, ce forfait venait il prendre sa place dans une litanie d’autres, ne s’en démarquant finalement pas ?
Reste qu’il ne voulait pas plus de fric, pas une nouvelle maison, pas un travail plus prestigieux, juste un titre. Bonjour la faille narcissique !
Se regarder dans le miroir. On n’ose imaginer la vie de cet homme après sa chute vertigineuse. Quelle explication s’est-il trouvé, que dit-il à sa femme, à ses parents, à ses amis s’il lui en reste ? Quel va-t-être le reste de sa vie ? Perso, quand je vois à quelle torture me soumettent deux ou trois conneries regrettables auxquelles j’ai eu le malheur de me laisser aller, cherche pas, y’a prescription, je ne voudrais pas être à sa place. Sauf à penser qu’il faille être finalement plutôt honnête pour souffrir de culpabilité, et que notre ex-ministre ne l’est peut-être pas du tout.