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9 juillet 2013 2 09 /07 /juillet /2013 18:02

 

 

 

Clemence-Joly---la-boucherie-de-laine---Le-carnet-de-Jimid.jpg

 

 

 

 

Lettrine (V foule africaine) Le carnet de Jimidi

 

 

ous me direz, après avoir vu Cal Lane transformer brouettes et bidons de tôle en dentelle, on ne va pas s’étonner que Clémence Joly tricote des côtelettes et des saucissons. Eh bien si, on s’étonne et on s’étonne même agréablement. Ceci dit, à part le côté « ouvrage de dame » et le fait que les deux nous aient été présentées sur Netkulture peut-être n’ont-elles aucun autre point commun ? Si, un autre : ce qu’elles font est drôle. Pas seulement drôle, mais au premier abord : drôle. Ah ! Puis se sont des femmes aussi.

 

Comme vous le constaterez en visitant le site de Clémence Joly, elle n’en est pas à son tricot d’essai. Il semble même que cet étal de boucherie lui ait été commandé par une mercerie de Londres. Elle avait déjà eu l’occasion de tricoter des trucs qui se mangent pour la vitrine d’une nouvelle boutique New Look à Lyon. Vous trouverez également sur son site quelques lignes d’intention, excessivement scolaires, auxquelles on pardonnera les énormes fautes d’orthographe et de syntaxe, dont j’ai essayé de débarrasser la version ci-dessous. Mais d’ailleurs, hop, comme ça se sera fait, que ce soit dit une bonne fois pour toutes : à Clémence Joly, on pardonnera tout, inconditionnellement.

 

 

Nous sommes entourés de produits de consommation d'origine animale. Que ce soit pour nos assiettes, nos garde-robes, médicaments ou meubles, les animaux sont une source incroyable pour nos besoins.
Etant donné mon intérêt pour l'esthétique de la mode et l'industrie de la viande, j'ai exploré les deux domaines et le paradoxe d'un morceau de tissu étant égal en importance à un morceau de viande. Alors que l'un est associé au glamour, l'autre est associé au sang et aux tripes.
Les deux représentent notre consommation quotidienne car nous avons besoin de l'industrie de la viande pour nous nourrir et de l'industrie de la mode pour nous vêtir. J'ai joué avec les outils et techniques de ces deux univers pour créer des hybrides amusant et artisanaux qui allient aussi bien l'esthétique d'un comptoir de boucherie qu'un podium de défilé de mode.

C. J.

 

Au secours ! Heureusement que le talent et la sensibilité de cette (sans doute très jeune) artiste se manifestent beaucoup plus clairement dans ce qu’elle réalise que dans ce qu’elle écrit. Ce qui me touche infiniment dans cette boucherie de laine, c’est qu’il semble bien – aussi incroyable que cette hypothèse (gratuite) puisse paraître – que ce qui rapproche la viande et le tricot échappe très largement à l’artiste elle-même. Il y a quelque chose, là. Elle semble ne pas savoir quoi, juste que les deux domaines l’intéressent. Alors elle les rapproche et il se passe quelque chose. Du moins dans les objets tricotés. À mon avis beaucoup moins dans sa robe en papier de boucher. Ce moment de la recherche est très intéressant. On peut passer une vie d’artiste à tourner autour du pot central personnel, qu’on devine, dont on pourrait dire précisément à quelle distance en est encore chaque œuvre, celle là plus près, celle là trop loin. On peut se perdre en route, sombrer dans la technique, ou dans le rabâchage. On peut désespérer d’y arriver, ou même craindre d’y parvenir. Ne se perdrait-on pas encore plus sûrement en trouvant enfin l’objet de notre quête ? Que resterait-il alors de nous si nous n’avions plus rien à chercher ?

 

Clémence Joly n’en est pas là. Elle en est même heureusement très loin. Elle tricote (au crochet) des rôtis, des tranches de jambon, des saucissons et des côtelettes parce qu’il y a quelque chose, là. Elle y va.

 

Mais moi qui ne tricote pas – ou plus exactement, plus – moi que les étals de boucherie font à la fois frémir et saliver, moi qui essaye de faire marcher ma tête, mon cœur et mes mots ensemble, je peux essayer de dire, sans aller chercher très loin d’ailleurs, simplement : L’habit, c’est ce qui enveloppe notre carcasse. C’est une réflexion sur l’épiderme à laquelle me conduit ce travail. Ce qui se passe dans la boucherie de laine se passe entre la viande crue et le tricot qui emmaillote, entre ce qui est mis à nu et douillettement emmitouflé. On se souviendra au passage d’où vient exactement la laine. Tricoter de la viande rapproche alors de façon saisissante le dedans du dehors, le profond du superficiel, le trivial du sophistiqué, mais sans annuler ces oppositions, juste en les tricotant ensemble.

 

Perso, c’est bien parce que ça me parle de ça que je marche, sinon, ce serait juste un gag de plus ou un énième exemple de ces artistes se damnant en professant qu’on peut tout faire avec des capsules de bière, ou du fil de fer, ou n’importe quelle technique avec laquelle ils aligneront des réalisations, parfois spectaculaires, mais n’ayant rien à dire, juste chargées de nous assommer de savoir faire.

 

Clémence Joly trouvera-t-elle ce qu’elle a à nous dire ? On verra. Si les petits cochons ne la mangent pas.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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