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11 août 2010 3 11 /08 /août /2010 09:52

 

 

Où est-elle, cette liste des over-blogs hautement recommandables, que je l’allonge un peu ? Suis passé ce matin par une page sous-titrée « Les personnes ayant visité “lafreniere.over-blog.net” ont aussi visité les blogs ci-dessous » proposant des liens, dont un, vers le très sympathique carnet de Raphaële Bruyère : If if, between - C'est pas grave, efface pas , une quasi voisine de Grenoble. Et là, je tente le truc casse gueule : vous présenter ce carnet avec en illustration un travail de Dalton Ghetti et une chanson de Bourvil. J’espère que t’es bien accrochée ?

 

 

 

 

 

Dalton-Ghetti---sculpteur-sur-mines--de-crayon-.jpg

 

 

Là où je ne regarde pas, il y a des choses à voir. R. B.

 

 

Lettrine--B-Raphaele-Bruyere-.jpgien sûr, j’aurais pu illustrer cette présentation du carnet de Raphaële Bruyère avec l’une de ses photos, voire même une carte postale, son carnet en regorge, mais je ne sais quoi me retient. Doit y avoir une part de scrupule : la photo, tu la prends en entier, ou pas. Un texte, en revanche, tu peux donner l’impression de juste le citer. Mouais. Ou peut-être les photos de Raphaële Bruyère m’ont-elles moins sauté aux yeux que ses textes ? Mais alors là...

 

Mardi 1 novembre 2005

 

Les vaches ne prennent pas de douche

 

) Vraiment l’air d’un con sur ce banc. Tous les jours, j’imagine que le gardien, ce connard de gardien, sans y penser, me regarde sur son écran. Il me traverse, me traverse plutôt que me regarde. Il ne me surveille pas vraiment. Il sait bien que je ne vais pas bousiller ses parterres de fleurs et faire des trous avec le museau, vu que j’ai pas de museau. J’aurai un museau, j’irai renifler les merdes de chien dans le carré « Ici, je fais ce que je veux ». Je ne renifle pas mais je les sens. Je sens que je vais finir par changer de banc.
(


) extrait (

 

 

 

C’est peu dire que Raphaële Bruyère écrit court, c’est peu dire également qu’elle écrit juste. Je l’ai déjà dit, mais un critère de qualité, ou du moins d’intérêt pour moi d’une expression, c’est de résoudre des paradoxes et Raphaële Bruyère, bien qu’ayant l’air de ne pas y toucher, y réussit magnifiquement. Elle concilie par exemple très bien la brièveté de ses textes avec l’immense sentiment d’ouverture qu’ils procurent, comme si, blancs sur sombre, les phrases de Raphaële Bruyère invitaient leur lecteur, par chacune de leurs lumineuses piqûres d’épingle dans la grisaille, à se rapprocher au plus près des mots, comme on colle son oeil à une palissade, pour voir. Raphaële Bruyère réussit également avec une langue dépouillée de tout ce qui « fait » habituellement poème - souvent de la vieille graisse - à construire jusqu’à des hauteurs assez vertigineuse, une poésie miraculeuse de légèreté. Mais vous pouvez y aller : ça tient et cette poésie là ne vous fera pas grossir, juste grandir. De plus, mais pour moi ça n’est pas rien, Raphaël Bruyère fait preuve d’une même créativité dans sa typo. Cette idée d’entourer les extrait d’une parenthèse fermante, puis ouvrante est juste géniale. Si c’est un produit maison, bravo. Sinon, bien vouloir m’indiquer le fournisseur.

 

 

Lundi 4 septembre 2006 

  

point d'ironie et les orties par milliers

 

) Point d'ironie je me dis, point d'ironie qui dit un sourire dans le coin et du coup tu fais moins le malin, tu fais moins la maligne, hein. Ah, ça tu veux de la vie, de la vie qui m'en bouche un coin. Mais voilà, je m'occupe, je retourne au jardin, hop, hop, je carotte la terre, je rabote la motte, je figure le lieu, je piétine la face de rattes, je taquine le doryphore et j'hésite pas, je framboise le bord, j'me sens bien d'un coup et j'attaque une première bière, un quinzième clope, un trente-troisième chapitre et je recommence, je groseille au nord, j'avale une prune, j'arpente l'arpent, je dévale le champ, je désavale la bière derrière le bosquet et je retiens un.
(


) extrait (

 

 

Vous tisserez vos propres liens entre le travail de Raphaël Bruyère, les crayons de Dalton Ghetti, découvert sur Netkulture et la chanson de Bourvil, mais perso, je vois là quelque chose d’également complexe et simple, d’également inutile et pourtant indispensable, d’également simplet en apparence mais heureux.

 

Jimidi

 

 

 

J'ai essayé de respecter un max la forme originale des textes de R. B. mais je ne suis pas arrivé à mieux. Désolé. l'extrait "Les vaches ne prennent pas de douche"  a le double mérite pour moi d'évoquer un ruminant familier de ces pages et de constituer le billet inaugural du carnet de Raphaële Bruyère.

 

 

  

 

Les crayons

 

 

Ell' n'avait pas de parents, puisque elle était orpheline. Comm' ell' n'avait pas d'argent, ce n'était pas un' richissime. Ell' eut c'pendant des parents, mais ils ne l'avaient pas r'connue, si bien que la pauvr' enfant, on la surnomma l'Inconnue.  Ell' vendait des cart' postales, puis aussi des crayons, car sa destinée fatale, c'était d'vendr' des crayons. Elle disait aux gens d'la rue : « Voulez-vous des crayons ? » Mais r'connaissant l'Inconnue, ils disaient toujours non. C'est ça qu'est triste.  C'est triste quand même de n'pas reconnaître son enfant, Il faut pas être physionomiste ! Il m'semble que si j'avais un enfant, moi je le reconnaîtrais ! À condition qu'il me ressemble, naturellement ! 

 

C'était rue d'Ménilmontant, qu'elle étalait son p'tit panier. Pour attirer les clients, ell' remuait un peu son panier. Mais un jour, un vagabond qui passait auprès d'son panier lui a pris tous ses crayons ! Alors, ell' s'est mise à crier :  « Voulez-vous des cartes postales ? Je n'ai plus de crayons. » Mais les gens, chose banale, n'voulaient plus qu'des crayons. Quand elle criait dans la rue, « Voulez-vous des crayons ? » Ils disaient à l'inconnue : « Tes crayons sont pas bons. » C'est ça qu'est triste.  C'est triste quand même : elle avait plus d'crayons. Forcément, elle s'baladait avec son panier à découvert, n'est-ce pas ? Alors l'vagabond, lui, il passait à côté d'son panier, n'est-ce pas ? Alors avec sa main, alors ... heu ... hop ! Il lui a pris tous ses crayons, comme ça elle n'en avait plus. C'est vrai qu'elle n'en avait pas besoin puisqu'elle n'en vendait jamais ! Mais quand même ! 

 

Un marchand d'crayons en gros lui dit : « Viens chez moi mon enfant, je t'en ferai voir des beaux. Je n'te demanderai pas d'argent. » Ce fut un drôle de marché, car c'était un drôle de marchand, et elle l'a senti passer, car elle en a eu un enfant.  C'est triste ça quand même d'abuser d'une inconnue comme ça ! C'est vrai qu'elle a été faible aussi ! C'est pas parce qu'il disait qu'il avait un... qu'il était... Enfin, elle avait un enfant quoi. Elle avait bonne mine ! Si seulement elle avait eu une mine de crayon ! Mais non, mais c'est ça qui la minait ! Alors elle l'a abandonnée, son enfant et qu'est-ce qu'elle a fait plus tard cette enfant, hein ?  Elle vendait des cartes postales, Puis aussi des crayons, car sa destinée fatale, C'était d'vendre des crayons. Elle disait aux gens d'la rue, « Voulez-vous des crayons ? » Mais r'connaissant l'inconnue, ils disaient toujours non. C'est ça qu'est triste.

 

 

Chanté par Bourvil

 

Du film « La ferme du pendu ». Paroles : Bourvil. Musique : Etienne Lorin. Enregistrée le 9 mai 1946. « La ferme du pendu » est le premier long métrage avec Bourvil, où il est appelé « le chanteur » et interprète la chanson les Crayons qui a lancé sa carrière. (Allociné)

 

 

 

 

 

 

 

commentaires

M
<br /> <br /> J'aime les deux, les crayons et les textes tout légers et remplis "d'humain". Fantaisistes sans être fantasques...<br /> <br /> <br /> <br />
Répondre
J
<br /> <br /> Oui hein ?<br /> <br /> <br /> <br />

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