Une petite chronique ciné, sans résumé et sans image, sans nom d'acteur ni de réalisateur, ça vous dit ? Je ne suis pas très bien placé pour vous parler cinéma : je n'y vais que trois ou quatre fois l'an. Attention, ça ne veut pas dire que je ne vois que trois ou quatre films par an. Je vous parle là de vraies sorties ciné, pour lequelles je paye ma place et tout. Mais il se trouve que j'y suis allé deux fois ces temps-ci, voir « L'odysée de Pi » et « Les bêtes du sud sauvage ». Sans doute cette proximité des deux séances va-t-elle me pousser à certains rapprochements, ou pire, à comparer ces deux films, mais tant-pis (pour Pi). Disons, pour situer rapidement et clairement mon propos qu'il faut (éventuellement) aller voir le premier parce qu'il est beau et l'autre (obligatoirement) parce qu'il est bon.
J'allais voir L'odysée de Pi pour les scènes avec le tigre dans la chaloupe. La situation me paraissait prometteuse et l'on pourrait penser que le côté animal constitue un point commun avec « Les bêtes du sud sauvage ». C'est d'ailleurs un contresens dans lequel sont tombés certains commentateurs que j'ai lu. Cherchant des bêtes, ils en ont trouvé, ce qui est d'autant moins compliqué qu'on voit effectivement intervenir de temps en temps dans le film des « aurochs » (beaucoup plus métaphoriques que réaliste : on dirait des cochons déguisés en tricératops). Oui parce qu'en fait, les bêtes du sud sauvage, c'est nous.
Je me demande même si le réalisateur de « Les bêtes du sud sauvage » ne s'est pas amusé à brouiller les pistes. Un titre qui évoque un docu animalier d'Arte, une affiche genre film d'animation, histoire qu'en s'attendant à quelque chose, l'effet de suprise soit à son comble. Si c'est le cas, ça a marché: j'ai été totalement pris de court. Finalement, c'est encore le slogan de l'affiche qui est le plus juste : « Tout ce que vous avez entendu sur ce film est vrai. » On pourait le dire autrement : Ce film a la très grande qualité des vraies oeuvres : toucher chacun personnellement en s'adressant à tous.
C'est finalement la « leçon de vie » qui rapproche le plus sûrement les deux films. Mais « L'odysée de Pi » m'a paru ouvrir péniblement sur la mystique quand « Les bêtes du sud sauvage » délivre sa leçon de façon beaucoup plus convaincante, durable, complexe, essentielle. C'est d'ailleurs une expérience assez étrange, en repensant au film, de voir que certains de ses prolongements se sont encore déployés depuis la dernière fois qu'on y a pensé, que cette magnifique fleur d'humanité qu'il a fait germer, n'en fini pas d'éclore.