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28 juillet 2013 7 28 /07 /juillet /2013 07:54

 

 Insecte steampunk 1

  

 

Lettrine--S-montre--copie-1.jpg

 

 

’il était besoin de se persuader une nouvelle fois que deux sentiments contraires peuvent finalement se rapprocher, les insectes, par la fascination et la répulsion qu’ils provoquent, nous en fourniraient un bon exemple. Les insectes, ce carnet en regorge, comme la Terre entière et Netkukture réunies. Chez lui, Tonton n’a pas encore eu l’idée d’une catégorie regroupant les articles de près ou de loin consacrés à ces créatures douées d’un nombre déraisonnable de pattes, mais de temps en temps, comme sous les pierres retournées par les enfants aux jardins, se trouvent mis là-bas en pleine lumière, des artistes penchés sur le petit peuple de l’herbe. Le dernier en date leur trouve des airs cuirassés de mécanique, imaginant leur intérieur plein de rouages d’horlogerie. Mike Libby, présenté par Netkulture dans une chronique, celle du 11 octobre 2010 (précisa-t-il comme pour simplifier la tâche d’un archéologue penché sur ce carnet dans mille ans) opère un rapprochement bien intéressant entre insectes et machines. Un rapprochement d’autant plus fécond pour l’imaginaire qu’au fond, on sent bien l’évidence informulée jusque là des connections entre ces deux mondes, la démarche de Mike Libby mettant juste le doigt dessus.

 

Insecte steampunk 2

 Insecte steampunk 4

 

 

Ceux d’entre vous que ça démangerait, ou pas encore assez, pourrons aller lire ou relire la chronique consacrée aux Insectes de cuisine de Sayaka Yamamoto et surtout aller de nouveau contempler le travail de Jean-Claude Teyssier, photographe animalier. On pourra également se rassurer en se persuadant que des armes existes contre les bébêtes. La chronique « Légitimes aspirations » en présente une, mais on ira surtout admirer sur « La moue du bulot » le blog de Tiwane, entre autres dessins somptueux, cette punaise et cette coccinelle, qui ont l’air de danser...

 

 

insectes - punaise et coccinelle - Titwane - La moue du bul

 

En ce moment, ne ratez pas non plus la série de photos de Christian Séguié consacrée à une certaine mante religieuse, croisée lors d'une balade avec un seul l. 

 

Mante-religieuse---Christian-Seguie.jpg

 

 

 

 

22 juillet 2013 1 22 /07 /juillet /2013 12:10

 

Autel-bouddhiste-a-la-gloire-du-dieu-Google.jpg

 

Lettrine--C-ruach-fin-du-monde-.jpgontrairement à ce que pourrait laisser penser ce qui va suivre, je n’ai rien contre la superstition. Après tout, si vous êtes persuadés que votre fiston doit son Bac au cierge que vous avez allumé devant la statue de Sainte Rita - sainte patronne des causes désespérées -  l’important, c’est qu’il l’ait eu. De la même façon, si vos petites granules de perlimpinpin 5ch vous font repousser les cheveux, quand bien même se serait une heureuse conséquence de l’effet placebo, je pense qu’il n’y a que le résultat qui compte. J’ajouterai, pour qu’il n’y ait décidément aucun doute sur les arrières pensées tapissant cet article, que je ne suis pas contre les croyances religieuses, du moins quand elles témoignent d’une quête spirituelle sincère. Si ça vous rend plus tolérant et plus ouvert à votre prochain, qui s’en plaindrait ?

 

Non, ce qui craint, c’est tout ce qui ressemble à un clergé, à des gourous, tous pour moi charlatans patentés. Un des problèmes du charlatanisme, c’est que son intérêt bien compris n’est pas du tout d’initier le croyant au grand tout, ni au Grand Manitou, mais de s’interposer comme interface indispensable. La position sera d’autant plus facile à tenir que le ciel et ses locataires présumés apparaîtront dans une nébulosité entretenue, que seuls leurs intermédiaires sur Terre sauront percer.

 

La position des gourous 2.0 me parait être la même vis à vis du dieu Google, grand dispensateur de référencement et donc de manne publicitaire. C’est du moins la conclusion à laquelle j’arrive en lisant l’article : « 10 Conseils Pour Ecrire Des Titres « Exceptionnels » Pour Vos Articles ! »  publié sur emarketinglicious.fr par Isabelle Mathieu.

 

On y retrouvera l’habituel mélange de bon sens et de n’importe quoi, l’un destiné à faire avaler l’autre. Pour le bon sens, je vous laisse juge, vous n’en manquez habituellement pas, mais c’est par exemple « Attirez l’attention » - quel projet original, pour un titre ! - ou, « écrivez un titre qui parlera à vos lecteurs » - Oui, tiens ? Je n’y avait pas pensé ! On semble avoir renoncé au « Si vous écrivez en français, faites le de gauche à droite » mais c’est de justesse. Pour le n’importe quoi, y’a le choix. Ça va de « Commencez votre titre par un chiffre » à « écrivez l’initiale de chacun de vos mots en majuscule » en passant par « bourrez avec des signes de ponctuation ». Il parait que si vous égorgez un poulet sur votre clavier, c’est encore mieux.

 

J’aime tout particulièrement la litanie des mots puissants : gratuit, secret, booster, tabou, banni, conspiration, dangereux, excellent, exceptionnel, meilleur, brillant, incroyable, gagnez etc. Ça au moins, ça promet d’être marrant : « Gratuit : perdez 2kg de cerveau en trois jours », « 12 secrets (tabous !) pour Pou»er votre chef à l’a!coo!isme », « Booster votre conspiration », « 2venir dangereux ? Excellent ! »

 

Bref, on aura compris que, ce qui me dérange dans ces dix conseils, c’est que quelqu’un puisse croire quelqu’un d’autre assez con pour en avoir besoin.

 

9 juillet 2013 2 09 /07 /juillet /2013 18:02

 

 

 

Clemence-Joly---la-boucherie-de-laine---Le-carnet-de-Jimid.jpg

 

 

 

 

Lettrine (V foule africaine) Le carnet de Jimidi

 

 

ous me direz, après avoir vu Cal Lane transformer brouettes et bidons de tôle en dentelle, on ne va pas s’étonner que Clémence Joly tricote des côtelettes et des saucissons. Eh bien si, on s’étonne et on s’étonne même agréablement. Ceci dit, à part le côté « ouvrage de dame » et le fait que les deux nous aient été présentées sur Netkulture peut-être n’ont-elles aucun autre point commun ? Si, un autre : ce qu’elles font est drôle. Pas seulement drôle, mais au premier abord : drôle. Ah ! Puis se sont des femmes aussi.

 

Comme vous le constaterez en visitant le site de Clémence Joly, elle n’en est pas à son tricot d’essai. Il semble même que cet étal de boucherie lui ait été commandé par une mercerie de Londres. Elle avait déjà eu l’occasion de tricoter des trucs qui se mangent pour la vitrine d’une nouvelle boutique New Look à Lyon. Vous trouverez également sur son site quelques lignes d’intention, excessivement scolaires, auxquelles on pardonnera les énormes fautes d’orthographe et de syntaxe, dont j’ai essayé de débarrasser la version ci-dessous. Mais d’ailleurs, hop, comme ça se sera fait, que ce soit dit une bonne fois pour toutes : à Clémence Joly, on pardonnera tout, inconditionnellement.

 

 

Nous sommes entourés de produits de consommation d'origine animale. Que ce soit pour nos assiettes, nos garde-robes, médicaments ou meubles, les animaux sont une source incroyable pour nos besoins.
Etant donné mon intérêt pour l'esthétique de la mode et l'industrie de la viande, j'ai exploré les deux domaines et le paradoxe d'un morceau de tissu étant égal en importance à un morceau de viande. Alors que l'un est associé au glamour, l'autre est associé au sang et aux tripes.
Les deux représentent notre consommation quotidienne car nous avons besoin de l'industrie de la viande pour nous nourrir et de l'industrie de la mode pour nous vêtir. J'ai joué avec les outils et techniques de ces deux univers pour créer des hybrides amusant et artisanaux qui allient aussi bien l'esthétique d'un comptoir de boucherie qu'un podium de défilé de mode.

C. J.

 

Au secours ! Heureusement que le talent et la sensibilité de cette (sans doute très jeune) artiste se manifestent beaucoup plus clairement dans ce qu’elle réalise que dans ce qu’elle écrit. Ce qui me touche infiniment dans cette boucherie de laine, c’est qu’il semble bien – aussi incroyable que cette hypothèse (gratuite) puisse paraître – que ce qui rapproche la viande et le tricot échappe très largement à l’artiste elle-même. Il y a quelque chose, là. Elle semble ne pas savoir quoi, juste que les deux domaines l’intéressent. Alors elle les rapproche et il se passe quelque chose. Du moins dans les objets tricotés. À mon avis beaucoup moins dans sa robe en papier de boucher. Ce moment de la recherche est très intéressant. On peut passer une vie d’artiste à tourner autour du pot central personnel, qu’on devine, dont on pourrait dire précisément à quelle distance en est encore chaque œuvre, celle là plus près, celle là trop loin. On peut se perdre en route, sombrer dans la technique, ou dans le rabâchage. On peut désespérer d’y arriver, ou même craindre d’y parvenir. Ne se perdrait-on pas encore plus sûrement en trouvant enfin l’objet de notre quête ? Que resterait-il alors de nous si nous n’avions plus rien à chercher ?

 

Clémence Joly n’en est pas là. Elle en est même heureusement très loin. Elle tricote (au crochet) des rôtis, des tranches de jambon, des saucissons et des côtelettes parce qu’il y a quelque chose, là. Elle y va.

 

Mais moi qui ne tricote pas – ou plus exactement, plus – moi que les étals de boucherie font à la fois frémir et saliver, moi qui essaye de faire marcher ma tête, mon cœur et mes mots ensemble, je peux essayer de dire, sans aller chercher très loin d’ailleurs, simplement : L’habit, c’est ce qui enveloppe notre carcasse. C’est une réflexion sur l’épiderme à laquelle me conduit ce travail. Ce qui se passe dans la boucherie de laine se passe entre la viande crue et le tricot qui emmaillote, entre ce qui est mis à nu et douillettement emmitouflé. On se souviendra au passage d’où vient exactement la laine. Tricoter de la viande rapproche alors de façon saisissante le dedans du dehors, le profond du superficiel, le trivial du sophistiqué, mais sans annuler ces oppositions, juste en les tricotant ensemble.

 

Perso, c’est bien parce que ça me parle de ça que je marche, sinon, ce serait juste un gag de plus ou un énième exemple de ces artistes se damnant en professant qu’on peut tout faire avec des capsules de bière, ou du fil de fer, ou n’importe quelle technique avec laquelle ils aligneront des réalisations, parfois spectaculaires, mais n’ayant rien à dire, juste chargées de nous assommer de savoir faire.

 

Clémence Joly trouvera-t-elle ce qu’elle a à nous dire ? On verra. Si les petits cochons ne la mangent pas.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

2 juillet 2013 2 02 /07 /juillet /2013 19:14

 

Richard-Dunbrack---Horloges---Le-carnet-de-Jimidi.jpg

 

 

À propos de Richard Dunbrack, dont l'infatigable Netkulture nous présentait le travail en  ce 6 juillet 2009, on pourrait se demander s’il propose des armoires, des horloges ou des sculptures. Mais ces précisions n’auraient pas vraiment d’importance, vu que ses meubles-œuvres apportent massivement avec eux un univers dont on sent bien qu’il est aux antipodes d’Ikéa et des références habituelles en matière de mobilier.

 

Le premier abord des horloges-sculptures-armoires de Richard Dunbrack est plutôt sympathique et j’ai cédé en les découvrant à un mouvement d’adhésion spontané, sur le mode : « Tiens ? Marrant ! » Mais au deuxième ras-bord, j’ai versé dans un scepticisme pas loin du rejet, le même qu’envers Disneyland et je le crains, pour les mêmes raisons. Je ne sais pas encore exactement où m’emporte cette chronique, mais j’ai bien peur que Richard Dunbrack en fasse les frais après m’être trouvé injuste avec lui puisque je sens bien que je vais régler des compte ouverts chez d’autres, de longue date.

 

On peut avancer sans grand risque de se tromper que Richard Dunbrack a dû entendre mille fois : « Ohhh ! On le/la/les dirait sortis d’un film ! » Je n’ai rien contre ce qui sort des films, ni des livres, c’est quand on me propose de ne pas en sortir et de m’y enfermer, que je sens poindre le malaise. Je peux me tromper, mais il me semble qu’un des grands charmes de la fiction se trouve dans ses différences avec le réel. C’est un écart qui n’est pas nécessairement large et sur lequel elle peut d’ailleurs jouer, en prétendant qu’il est nul. Il doit y avoir un mot pour ça. Il m’échappe. Ce mot dirait qu’on sait, qu’on a besoin de savoir quand est-ce que c’est réel et quand ça ne l’est pas, quand est-ce qu’on est « dedans » et quand est-ce que qu’on est « dehors ». Ce n’est pas incompatible avec notre faculté de jouer le jeu de la fiction quand on  y est immergé ; d’y croire complètement. Je dirais même, au contraire.

Or les tentatives sont nombreuses pour nous faire croire que le réel n’est jamais qu’une histoire et un décor comme un autre et que là aussi, tout va toujours bien se terminer. Les tentatives pour fictionner le réel, on est bien placé en France pour les apprécier puisqu’une majorité d’électeur a pris comme personnage principal du feuilleton de la Vème république, un illusionniste capable à la fois de nous bercer d’illusion et de nous endormir en nous racontant de belles histoires. Le mensonge, car s’en est un, est de vouloir nous faire croire que les fictions se valent et que l’Histoire, la vraie, ne tient qu’à la façon de la raconter. Un mensonge voisin voudrait que la fiction et pendant qu’on y est la littérature, et hop, l’art, et boum, toute la culture n’ait pour seule fonction que de nous divertir, de nous faire nous évader, d’oublier. Mais oublier, ce n’est pas se faire de faux souvenir et nous évader, si c’est pour changer de taule, non merci !

 

Tiens, elle est peut-être là, l’irréductible frontière entre l’art et la soupe : l’un attise la faim de penser, la soif de savoir, la curiosité, il redresse et met en mouvement, l’autre gave et repaît jusqu’à la satiété, nous endort, nous allonge, nous souhaite « de beaux rêves », ceux dont on voudrait ne jamais s’éveiller. Mais ne plus jamais se réveiller, ne plus jamais être vraiment là, ça port un nom, et même plusieurs : la matrice, le tombeau, l’illusion permanente, la folie…

 

Ça y est ? Je me suis emballé ? J’ai largué Richard Dunbrack ? Ah oui, tiens, il est resté vingt lignes plus haut. J’ai peur d’un intérieur qui serait à l’image de ce qu’il propose. Peur comme me font peur ces chambres de petite fille où tout est rose, peur qu’on finisse tous figurants dans un parc à thème, qu’on pourrait appeler, ha ha, « Nerverland ».

 

 

Figurants de parcsPieter-GIJSELS--1621-1690--Anvers---Paysage-d-ete.jpg à thème II

 

 

C’est encore tout énervé par ma chronique «Figurants de parc à thème » que je suis tombé chez Martin Lothar et son manuel de survie sur ce tableau de Pieter GIJSELS (1621-1690, Anvers) titré : « Paysage d’été », mais que perso, j’aurais intitulé : « Oh chéri regarde : des gueux ! »

 

Ça va être le tour de Pierter d’en prendre injustement pour son grade, mais, bile échauffée ou non, je trouve sa campagne d’été proprette. Y’a rien qui dépasse et surtout pas la mauvaise herbe de la lutte des classes. C’est une campagne de carte postale, qui préfigure celle de Marie Antoinette : Prise de passion pour le Petit Trianon, la Reine Marie-Antoinette y fit créer (dans les années 1780) un véritable hameau avec tous les bâtiments d’une ferme modèle : chaumières, colombier, moulin et une laiterie. Loin des rumeurs de la Cour, elle peut y jouer à la fermière, entourée d’amis proches, telle la duchesse de Polignac ; la reine et ses amies jouent les bergères, vêtues de toilettes légères, blanches de préférence et coiffées de capelines fleuries. Venus de Suisse, des petits troupeaux de vaches et de moutons égaient les pelouses ; les moutons ont le cou orné d’un noeud de satin.

 

C’est donc bien à une mise en scène, à une représentation de la campagne à laquelle nous assistons en regardant ce tableau. Ça me parait particulièrement évident avec l’histoire qui nous est racontée à droite : « La campagne ? Tu attends que les fruits de l’arbre en face de chez toi soient murs, puis tu n’as plus qu’à les récolter à pleins paniers pour les vendre aux gens qui passent. En plus, tu peux en donner à bouffer aux gamins, c’est pratique. »

 

On cherchera en vain à identifier l’arbre en question. On remarquera juste que toute personne sensée, si elle voulait en récolter les fruits, ne l’aurait pas laissé pousser au point qu’il ne tienne même plus dans le tableau. Le reste est à l’avenant. C’est dire qu’entre la campagne et l’idée de campagne à l’usage de ceux pour qui elle n’est supportable que l’été quand il ne pleut pas, y’a un monde.

 

Aux lecteurs de cette chronique, qui auraient sur l’agriculture et l’élevage la tête encore joliment plantée de potagers et toute bruissante de basse-cour, on conseillera la série « Notre pain quotidien » filmant sans aucun commentaire et sans agressivité particulière d’ailleurs, les conditions de production de notre bouffe actuelle, celle que vous et moi achetons en grandes surfaces. J’ai encore en tête un aspirateur à poulets vivants, des tapis roulants charriant des flots de poussins traités comme de la matière première et le regard fou d’un bœuf qui allait mourir et le savait.

 

 

 

2 juillet 2013 2 02 /07 /juillet /2013 18:39

 

 

 

Lettrine (i Rockwell coquelicot) le carnet de Jimidil semble que je ne sois pas le seul génie littéraire intergalactiquement méconnu, oublié dans les replis du Web profond. On est au moins deux. Moi radotant sur ce carnet souffreteux, l’autre, condamné à perpétuité sur Mensway ™ Love & techno à bodybuilder les argumentaires accompagnant les gadgets vendus sur ce site. Je n’en veux pour preuve que les quelques phrases escortant l’aspirateur à insectes. Attention : plus rien ne sera jamais comme avant.

 

Qui n’a jamais rêvé de se débarrasser de ces vilaines araignées et autres insectes rampants ? Plutôt que de les asperger, de les écraser et donc avoir mauvaise conscience, pourquoi ne pas tout simplement les aspirer ? Avec cet appareil vous n’avez qu’à tendre le bras en direction de l’insecte indésirable et celui-ci sera purement et simplement avalé. Cette technique n’engendre aucune production de gaz ou d’effet toxique. Mention spéciale pour son design Glamour pour vous Mesdames !

 

Et là, bien sûr, vous attendez la photo, le lien. Vous passez frénétiquement la souris sur mes phrases pour tenter (en vain) de combler l’insupportable béance ouverte au plus profond de vous-même par ces quelques lignes prodigieuses. Oui, mais non™. Ici je suis Dieu. Je tiens les manettes et si j’ai décidé que le lien hypertexte que vous attendez ne passera pas sur cette ligne, vous prendrez le prochain. Je vous tiens. Les passants égarés sur ce carnet dans l’espoir (toujours déçu) de trouver le numéro de téléphone de Mélanie (de Tours) ne sont pas si nombreux que je puisse les laisser s’échapper sans tenter de les assommer d’une nouvelle volée de considérations ineptes qui font ressembler ces pages à un foie de cirrhotique. Vous assisterez donc en direct à l’autopsie du paragraphe, au démontage pièce par pièce de la splendide machine littéraire accompagnant l’aspirateur à insectes et peut-être, peut-être, si vous êtes très sage, si vous me passez les outils, peut-être vous laisserais-je vous échapper vers la page originelle, le point précis où vous pourrez aller vénérer le rédacteur de cette boulversifiante prose.

 

Autopsie : Qui n’a jamais rêvé de se débarrasser de ces vilaines araignées et autres insectes rampants ?  J’en vois d’ici objecter que les araignées ne sont pas des insectes et que ramper suppose de se déplacer sans pattes. Les mêmes, dans des circonstances d’ailleurs assez voisine, nous objecteraient que les petites bêtes ne mangent pas les grosses, et les mêmes, choutés par les discours écolos du moment, essayeraient de nous convaincre que ces petites horreurs abjectes sont bien utiles dans le grand cycle de la vie domestique, qui va de la penderie de l’entrée à notre chambre à coucher, en passant par les mites alimentaires cachées dans notre sac à pain et les blattes agitées par leur danse propitiatoire, espérant derrière la cuisinière nos prochaines projection graisseuses. Tous ces crétins rationalisant peuvent bien essayer de tirer à eux la couverture du réel pour s’en couvrir les yeux, il n’en demeure pas moins que nous sommes en guerre. La lutte sans merci dans laquelle nous sommes engagés est de toute éternité celle du Bien contre le Mal. Le réel n’en est que la partie émergée, le lieu des petites batailles. Qui n’a jamais rêvé, l’indique bien : notre lutte n’épargne ni l’imaginaire, ni l’inconscient, ni le symbolique, ni rien. Nous le savons parfaitement en surprenant l’ennemi dans notre baignoire. Il n’est qu’un émissaire, un représentant minuscule et isolé de la grouillante noirceur qui surgirait à l’air libre si nous ne montions pas bonne garde.

 

Donc nous avons besoin d’armes. Mais comme la guerre n’autorise pas tout et que le crime de guerre existe, sans parler de la convention de Genève et de tous les textes destinés à séparer la guerre juste de ce qui serait juste de la barbarie, nous avons besoin d’armes éthiquement correctes. Donc pas question de noyer l’ennemi ni de l’écrabouiller. Non mais pourquoi pas l’arme atomique pendant qu’on y est ! Pas question de nous laisser enfermer dans le classique dilemme de la fin et des moyens ni de nous laisser piéger pas la mauvaise conscience. Il nous faut une arme indiscutable, quelque chose comme le sabre laser des chevaliers Jedi. Nous allons juste tendre le bras vers l’ennemi et il sera aspiré directement du réel dans ce néant duquel il a eu l’imprudence de sortir.  Nous resterons alors en totale conformité avec les textes en vigueur puisque cette technique n’engendre aucune production de gaz ou d’effet toxique. Courage soldate, la victoire totale n’est pas loin.

 

Dernier argument, mais non le moindre : le design glamour. Pour un aspirateur ? Vous demanderez-vous peut-être en esquissant un léger sourire. Vous ne devriez pas. Vous croyez sincèrement que Mélanie accepterait de partir en guerre dans un uniforme qui la boudine ? Ou sans s’être assurée au préalable que les rations de survie ne font pas grossir ? Non mais oh ! On peut être engagée corps et âme dans la guerre totale contre le mal et ne pas renoncer pour autant à toute féminité ! Nous voilà heureusement arrivés au bout de l’autopsie. Je vais pouvoir me laver les mains changer d’uniforme et prendre une douche.

 


 

Aspirateur-a-insectes.jpg

 

 

 

 

 

Froide. Parce que l’examen attentif des photos de l’aspirateur à insecte nous replonge hélas dans un réel qui fait un peu frissonner. Comme vous le verrez sur les photos, notre aspirateur est en trois parties. Une partie moteur, un tuyau rigide transparent, un bouchon en forme de fleur. Le tuyau transparent s’ajuste sur l’extrémité protubérante (mais adaptée) du moteur, mais celle-ci est obturée par une fine grille destinée bien sûr à ce que l’ennemi ne soit pas aspiré au-delà. Il ne manquerait plus qu’un kamikaze pourvu d’un nombre déraisonnable de pattes se sacrifie pour aller bousiller votre arme ultime de l’intérieur ! Oui mais alors nous allons avoir un problème. Je vous montre la scène. L’ennemi s’est laissé stupidement surprendre dans la baignoire. On le tient. Vous vous emparez de votre arme. Vous enlevez le bouchon à fleur de sécurité, vous appuyez sur « on ». Le bruit de l’engin a déjà des échos de victoire. Vous tendez le bras vers l’insecte indésirable et comme prévu, il est aspiré. Vous remettez le bouchon pour lui interdire toute retraite. Vous éteignez. Là, vous voyez parfaitement grâce à la transparence du tuyau que l’aspiration de l’ennemi vers le néant s’est arrêté en chemin à la grille et que votre émissaire des forces du mal, bien loin de disparaître, se remet de sa légère commotion et entreprend de visiter son nouvel espace vital qui va du bouchon à fleur jusqu’à la grille moteur de votre arme ultime. Prisonnière mais bien vivante la vermine ! Oh, mais c’était pas vraiment prévu ça !

 

Il vous reste à réenclencher la machine pour de nouveau coller la bestiole à la grille, enlever précautionneusement le bouchon-fleur sans éveiller ses soupçons, secouer le tout au-dessus de la cuvette des chiottes et tirer la chasse. Variante : la même chose au-dessus d’une surface lisse où vous profiterez que cette petite horreur soit groggy pour l’écraser. Finalement, la seule chose que vous aurez alors aspiré, c'est votre mauvaise conscience. Bah ! À la guerre comme à la guerre.

 

1 juillet 2013 1 01 /07 /juillet /2013 22:49

 

 

 Bob-Morane---Les-tours-de-cristal.jpg

 

 

 

Lettrine (P bob morane)ar un concours de circonstance assez extraordinaire, de ceux qui nous font conclure que décidément « le monde est petit », il se trouve que D. une collègue fraîchement débarquée de la réunion est mariée à un savoyard, propriétaire d'une résidence secondaire dans le village où réside encore une bonne partie de sa famille, cette maison se trouvant mitoyenne de celle de la veuve du parrain de mon frère.

 

Je sais,  présenté de la sorte, ça fait un  peu « Je connais la femme de chambre du dentiste d'un roadies de Daniel Guichard», mais il se trouve que dans cette maison de chartreuse, celle de la veuve de, etc. j'y suis allé plusieurs fois étant petit. Tu dis ? Jusque là on s'en fout complètement, au moins autant que de toutes les baraques dans lesquelles des gens plus ou moins connus ont passé une nuit ? Certes, mais attends : Dans cette maison, comme dans beaucoup de celles où l'on ne passe qu'une partie de l'année, se trouvaient entreposé un tas de livres, entassant ceux qu'on ne juge plus assez intéressant pour les laisser à demeure dans notre résidence principal, quand on a la chance d'avoir plusieurs domiciles, où que celle-ci se trouve un peu envahie (les livres se reproduisent entre eux, c'est bien connu) ou que les enfants on grandi, ou juste qu'on en a marre de les voir.

 

Et dans ce tas de vieux livres, à l’époque, oh merveille ! toute une série de « Bob Morane », les premiers, ceux avec la couverture jaune. J'ai alors plongé dans Bob Morane comme seules les fringales peuvent nous faire plonger, toi dans la crème glacée et le Nutella, moi dans la lecture, avec cette même impossibilité d'en sortir avant d'avoir tout fini. Je ne peux pas jurer les avoir finalement tous lus : y'en a quand même une bonne cent-trentaine, mais le début de cette longue orgie a bien commencé en Chartreuse, dans cette maison mitoyenne de celle de ma collègue. Du coup, quand elle nous a invité à venir passer quelques  jours là-haut pendant les vacances de février, et cherchant ce qu'on pouvait bien lui apporter, j'ai pensé à des livres, choisis parmi ceux qui m'envahisse, ou que j'avais marre de voir, ou ceux devenus moins utile depuis que les enfants ont grandi et moi avec. Et justement, il s’est trouvé qu'après une crise de nostalgie m'ayant fait courir les bouquinistes, j'avais racheté l'année dernière à prix d'or une petite dizaine de Bob Morane ; l'édition à couverture blanche. J'ai donc joint ces Bob Morane là aux autres livres condamnés à l’exil, mis tout ça dans mon sac de voyage et laissé les bannis en Chartreuse.

 

J'aime bien cette idée qu'après une bonne quarantaine d'année, de part et d'autre d'un mur mitoyen de Chartreuse, se trouvent réunis les premiers Bob Morane que j'ai lu et les derniers que j'ai achetés. Le monde n’est pas si petit que ça. Ce qui surprend, peut-être, c’est qu’il soit clos.

Jimidi 16 mars 2010

4 juin 2013 2 04 /06 /juin /2013 13:53

 

 

 Soucoupe-volante-personnelle---1959---Le-carnet-de-Jimidi.jpg

 

 

Lettrine--T-Arial-black---Pionner-11--Le-carnet-de-Jimidi.jpghurhan’s Bey Company nous propose, parmi moult pin up, robots et fusées, ce « Personal flyng carpet » qui m’a bien l’air d’une soucoupe plutôt que d’un tapis. Et là, tu attends sans doute un article aigre doux sur le ton « ce qu’on pouvait être cons, quand même... » mi nostalgique, mi amusé, tant il est vrai que la constance avec laquelle on se trompe en imaginant l’avenir prête à sourire.

 

Nos boules de cristal ne montrent qu’un présent déformé. C’est en substance ce que conclut Ysengrimus à l’issue d’un excellent article titré : « Le lourd passé de nos futurologies » dans lequel il recense nombre de ces avancées technologiques ou sociologiques promises en leurs temps à un bel avenir, très marginalisées à présent, voire tout à fait oubliées. Il presque termine son article ainsi :


Beau lot de fours, hein ! Et donc, finalement, le ratage de nos prédictions explicites, à quoi tiens-t-il ? Fondamentalement, à une outrecuidante hypertrophie triomphaliste de la jubilation de l’existence présente. Le fait que l’innovation assouvit ou rafraîchit une génération n’assure pas sa pérennité pour les générations suivantes, si elles ne souffraient pas, elles, du manque. Grossir n’est pas grandir. Projeter linéairement et mécaniquement n’est pas anticiper. Une option dépassée peut toujours refaire surface sous une autre forme, plus complexe, plus fondamentale. Perspective n’est pas prospective. Simplettes et ahuries, nos boules de cristal sont déformantes, amplifiantes et inversantes. Elles restent fondamentalement des miroirs déformants plus que des télescopes informants. Notons aussi que la majorité des futurologies décrites ici concernent des objets dont la mise en place ethnoculturelle fut hautement dépendante de leur mise en marché commerciale. Vendre n’est pas prédire, mais feindre de prédire. Mise en marché, publicité, marketing, déformation, distorsion, amplification, diffraction, jubilation (réelle ou factice), optimisme excessif, triomphalismes et intimidations propagandistes, tout cela prend son pli sur le même support pratique et idéologique.


Ysengrimus achève en relevant que personne n’avait vu venir les nouveautés majeures qui imprègnent en profondeur notre présent, comme Internet, mais pas que. Mon propos est ailleurs et je vais essayer de rester au plus près de la flying carpette pour le soutenir.


Ce qui me frappe, d’entrée, c’est sa qualité formelle. Je ne sais pas qui est ce R Y. signataire de l’illustration, mais voilà quelqu’un qui n’a pas volé ses sous. L’illustrateur arrive à figurer le véhicule en quasi gros plan tout en le mettant en situation de nous raconter cette histoire simple : Par un beau matin d’été, après avoir fait les courses, Madame, sa fille et le chien rejoignent la maison familiale ou les attendent monsieur et fiston, occupés à tondre la pelouse. La soucoupe s’incline pour son approche finale ; en bas, Bob et Junior on dû l’entendre puisqu’ils regardent en l’air. On s’y croirait.


L’image date de 1959 et bien sûr, on ne peut s’empêcher de relever ce qui l’inscrit à nos yeux dans son époque. Essentiellement les coiffures, vêtements et occupations des personnages féminins. Je ne vois là aucune maladresse. Il s’agit à l’évidence de renforcer la séduction du tableau aux yeux de ses contemporains, de faire en sorte qu’ils puissent facilement s’imaginer, tels qu’ils étaient ou presque, avec leurs robes plissées serrées à la taille, et leurs cheveux bigoudis, mais dans ce véhicule d’un autre temps. A contrario, si R Y. avait dessiné la conductrice en jean slim et la gamine lookée manga, il n’aurait sans doute pas suscité la même adhésion.


Mais ce qui reste troublant, dans cette image, et c’est là que je voulais en venir, c’est ce qu’elle montre d’encore désirable, et je ne parle pas seulement de vous chère petite Madame, même si vous êtes restée très bien.


Ça commence par la baraque elle-même. Quitte à enfoncer la porte généreusement ouverte de ta maison individuelle, il faut rappeler que l’accession à la propriété, si possible constituée d’une maison avec jardin, reste un désir puissant. Celle-là n’est pas mal : des lignes simples, une pergola, une probable cheminée feu de bois et sur le toit, ce qu’on identifierait maintenant comme de possibles panneaux photovoltaïques. Elle est sise dans un environnement rural que ne défigure aucune routes, devenues inutiles depuis que les voitures volent. C’est donc un environnement débarrassé du moteur à explosion et du recours aux énergies fossiles. Certes, l’image est destinée à promouvoir une compagnie d’électricité, et on aimerait alors être sûr qu’elle provient de ressources renouvelables et non polluantes, mais là dessus, l’image laisse penser plus qu’elle ne dit.


Reste le véhicule. Celui-là ne nous impose aucune démonstration assommante de sa technologie. Ni hélice ni turbine ni pot d’échappement, à peine une calandre : tout est sous le capot. On ne saura pas comment, mais ça vole et c’est l’essentiel. Parce qu’en effet, je crois très sincèrement que le rêve d’Icare, voler, reste lui aussi un moteur puissant de notre imaginaire. Perso, c’est d’ailleurs ma principale source de déception vis à vis de l’an 2000 et suivants. On s’épuiserait à recenser les fictions dans lesquels les déplacements individuels aériens sont d’une telle banalité qu’ils ne figurent même pas au premier plan de l’intrigue mais plutôt dans le décor. Ce n’est même souvent qu’un accessoire dans la panoplie des super-héros. Bref, dans les livres et les films, tout le monde vole, sauf moi.  


Oui, bon, c’est vrai, on m’a offert pour mes quarante ans un baptême de l’air en parapente, au Puy de Dôme. Si vous avez l’occasion, faites le. Vous aurez alors peut-être, comme moi, non pas l’impression de découvrir certaines sensations, mais de les retrouver. Je ne sais pas s’il s’agit là d’un retour de mémoire atavique ou plus prosaïquement de l’effet de dizaines d’années de lecture de science-fiction, mais le fait est là : j’étais là-haut tout à fait chez moi. Et comme je ne doit pas être le seul à tourner certaines aspirations vers le ciel, je ne dois pas être le seul non plus à espérer la voiture volante.


Dernier détail charmant livré par l’image sur ce véhicule : la porte. Je me suis demandé un moment, en voyant la soucoupe en vol, comment on pouvait y entrer et en sortir. Il semble que l’illustrateur se le soit demandé aussi puisqu’il fait figurer, en réponse, une autre soucoupe garée à terre, portes ouvertes. La partie inférieure s’abaisse pour faire marchepied, la partie supérieure pivote en aile de papillon et la partie avant de l’hémisphère transparent coulisse dans l’autre. Tout ça est électrique, bien sûr.

 

 

3 juin 2013 1 03 /06 /juin /2013 15:55

 

 

 

J'actualise : Avec 200 millions d'euros, tu aurais pu de payer Bernard Tapi. C'est ce qu'il aurait touché en "net" une fois payé ce qu'il devait à droite à gauche et au fisc, sur ses 450 millions. Avec 100 millions d'euros, tu aurais pu acheter l'ile d'Onassis en mer Égée. Sa petite fille l'a vendue à un russe, y'a peu. Elle a l'air pas mal, je parle de l'ile, même si c'est une deuxième main. 

 

 

Parlons un peu de cet article du Monde 2 du 18 avril 2009 titré « Heureux millions ? » en soulignant que pour une fois, tu avais de la chance (à l'époque) ce n’est pas un article rance de cinq ans. Non parce que le circuit du Monde 2, avant qu’il ne m’arrive sous les yeux (et parfois sous les vôtres) est un peu contourné. Il faut déjà attendre que mes parents le reçoivent – ce sont eux les abonnés – puis qu’ils l’aient lu, ou qu’ils aient renoncés à le lire, puis qu’ils me le mette de côté, puis qu’à l’occasion d’une visite chez eux j’en prenne livraison (avec Le Monde des livres et un tas d’autres trucs) puis qu’il traîne un peu dans la maison, puis que lui et moi on se retrouve au même endroit et que je n’ai pas grand-chose d’autre à faire que de le lire. Donc aux toilettes. Mais même là, comme il y a le choix des lectures…

 

 

Je cite le chapeau de l’article, ça nous fera gagner du temps :

La fortune est tombée sur Caroline et Gérard M. en avril 2008 : près de 60 millions d’euros gagnés à l’Euro Millions. Avec elle, une foule d’angoisse et d’interrogations : comment et quoi dépenser sans se faire repérer, comment ne pas risquer de tout perdre ? Sous couvert d’anonymat, le couple a accepté de raconter au « Monde 2 » sa première année passée à s’habituer à la grande richesse. Frédéric Potet.

 

 

Saluons le ton de l’article, qui ne tape ni dans le conte de fée à la gloire d’Euro Millions, ni dans le contre-pied genre voyez comme ils sont malheureux maintenant qu’ils sont riches. Non, on est dans un propos journalistique mesuré, qu’on sent assez fidèle aux propos recueillis et à l’histoire de ce couple. C’est d’ailleurs bien ce qui m’a intéressé. Mais avant, il faut parler fric.

 

L’assomme

C’est « près de 60 millions d’euros » et très exactement 58 367 681 €. Tu auras remarqué que le journaliste n’est pas à deux millions d’euros près, allez hop, on arrondit. Il nous faut combien d’années pour gagner un million d’euros ? 40 ans ? 80 ans pour en gagner deux ? On s’en fout, on arrondit.

 

C’est dire qu’on a du mal à se représenter la somme. L’article cite d’ailleurs des éléments de calculs des intéressés pour se la représenter : « J’ai dû faire la conversion en smic, 58 millions ça fait 4000 années de smic. » Mais comme le journaliste sens bien que ce n’est pas vraiment plus réel comme ça, il ajoute : « Ou encore une centaine de vies entières à travailler. » (Sur la base d’une vie professionnelle de 40 ans payée au smic.)

 

« Oui, mais moi je ne suis pas au smic, et je me fous des 99 autres !» objecterait à raison Mélanie (de Tours) avec ce rien de condescendance qui la rend parfois agaçante, mais qu’elle fait passer avec cette moue adorable de ses lèvres pulpeuses. Moi non plus, je ne suis pas au smic et grâce à mon salaire de ministre, il ne me faudrait que 2 210 ans pour gagner cette somme. Ça ne dit encore pas grand-chose. Un peu plus loin, le journaliste, qui sent bien qu’on patauge dans nos tentatives d’établir des ponts entre ce montant et la réalité, nous propose un autre calcul : Les placement des gagnants, une fois le million d’impôt annuel déduit, leur assurera un revenu mensuel de 66 000 euros. Ah, ben là, oui, surtout qu’à deux, finalement, ça ne fait jamais que 33 000 € chacun.

 

Et après ?

Je vous martèle un peu ces chiffres, mais c’est pour tenter de faire contraste avec la suite. Parce qu’il semble bien que confrontés à ce décalage entre leur réalité et l’énormité de leur gain, nos heureux gagnants aient eu des difficultés voisines. Je te passe leurs états d’âme, les stratégies pour ne pas apparaître à l’évidence comme des soudains multimillionnaires. Non, ce qui m’a intéressé, c’est leur côté « Merde ! Que faire de tout cet argent ? »

 

Je cite les propos de Mme, que rapporte le journaliste : « Mais on est à la campagne ici, et il n’y a rien à acheter. C’est comme si on ne savait pas quoi dépenser. On n’a pas d’idées. » et plus loin, l’évocation du Noël familial (ça fait neuf mois qu’ils sont riches à million) « Noël se passe plutôt paisiblement… Et sans folies. Des cadeaux « normaux » sont offerts aux enfants : un robot, une panoplie de Zorro, des puzzles… « On ne veut pas les gâter et faire d’eux des gosses de riches », insistent les parents. Gérard reçoit des pulls de la part de Caroline. Et Caroline… rien ! « Je n’avais pas d’idée », s’excusera le mari tout penaud.

 

Là, je sais pas toi, mais on aurait quand même très envie de les avoir sous la main les deux, pour les baffer, en leur disant que c’est pas possible d’être aussi cons. Je vois déjà Mélanie (de Tours) qui est quand même une virtuose de la carte bleue, se proposer de leur donner des leçons de razzia. Et ça a été mon premier mouvement : « Attends, mais moi, je… »

 

Moi je quoi ? Construire le chalet rond sur un joli terrain et même, soyons fous, sur l’endroit parfait. Combien ? Disons 500 000 euros ? Un million si je dois en plus acheter le maire pour faire modifier le plan d’occupation des sols ? Le tour du monde dans un sens, 25 000 euros ? puis dans le sens inverse pour voir : de nouveau la même somme. Une jolie voiture, deux ? Assez d’argent de poche pour mes vieux jours, des apparts pour les enfants – heureusement j’en ai cinq – total ? Total, même en tirant bien, avec quatre ou cinq millions d’euros, c’est plié. Du coup, ce n’est pas à l’énormité de la somme que nous voilà renvoyés, c’est à nos rêves de gagne petit, de fonctionnaires, de ménagère, de consommateurs.

 

Parce qu’on peut trouver hallucinant que ces gens là n’aient pas pensé une seconde à ce qu’ils pourraient bien faire s’ils gagnaient le pactole. Mais même si l’article ne le dit pas, on peut l’imaginer : Ils se sont dit qu’en gagnant un peu, ils pourraient solder l’emprunt de la maison, mettre un peu de côté pour les enfants, changer un peu de lave-linge et bref, toute proportion gardée, ils avaient des rêves à leur mesure et sans doute assez peu différents de toi et moi. Des rêves pas assez grands pour qu’un ou deux millions d’euros n’en viennent à bout. Des rêves de toute façon beaucoup trop petits et dont 58 millions d’euros les ont totalement privé.

 

 

 

20 avril 2013 6 20 /04 /avril /2013 14:41

 

 

 

Restons légers pour un samedi où le temps est, comment dire ? à se flinguer, voilà. 

 

 

David Tenier

 

 

Lettrine (J avec auréole) le carnet de Jimidi

 

 

’ai honte. Oui, enfin bon, non, j’exagère : j’ai presque honte de m’être servi du tableau de David Teniers tant l’original est extraordinaire. D’ailleurs, allez le voir là, ce sera fait. Plein de tableaux dans un tableau. C’est fascinant comme les clins d’œil à d’autres films dans un film, comme un roman sur un roman, comme une petite musique qu’on reconnaît dans la musique de quelqu’un d’autre et comme toutes les mises en abîme, à commencer par les boucles d’oreille de la Vache qui rit. Il y a certainement eu un historien de l’art pour nommer précisément chaque tableau peint sur le sien par David Teniers, qui s’est livré plusieurs fois à cet exercice. Ce même historien nous dirait si le peintre a été fidèle à ses modèles ou si, subrepticement, hop, il a corrigé un ciel ou un cadrage, voire rajouté des détails, ni vu ni connu. Perso, c’est ce que j’aurais fait, mais on connaît mon absence totale de scrupules. Ma première idée était de remplacer les tableaux originaux par autant de Cézanne, Monet, Picasso… sans que ça ne se voit trop, pour qu’on puisse avoir un doute. Puis emporté par mon élan, j’y ai fourré un peu n’importe quoi, à commencer par mes propres tableaux détournés. Pour fini, j’ai même fait figurer dans le tableau un autre tableau du même peintre, sur le même sujet, si bien que localement, ce tableau montre un tableau qui montre des tableaux. Ouf !

 

 

 

 autoportrait

 

 Bip bip et cancoillote

 

 

David et Colgate

 

 

Joséphine de Beauharnais ange gardien

 La naissance de Venus William

 

 La nuit est toilée

 

 La petite annonce faite à Marie

 

 La récréation d'Adam

 

 La vénus de Milou

 Le baptême de Jésus au gourdin

 

 L'edam à la licorne

  L'edam à la licorne

 

 Le grand camyon du Colorado

 

 Le gris

 

 Le marcel de Michelange

 

 L'enlèvemement des bassines

 

 Le panseur

 

 

 

Le-rideau-de-la-Meduse-copier.jpgLes glandeuses

  Mona lisant

Pfiuuuu ! M’a bien fait chier la Joconde. Je ne trouvais pas quoi en faire, puis avec « Mona Lisa » ça s’est décoincé, mais il n’y avait pas moyen de trouver une photo de journal qui aille. J’ai du réquisitionner du personnel et prendre le cliché moi-même ! Si vous ne savez pas quoi faire, vous pouvez toujours attaquer les grilles de sudoku.

 

 

 

 

 

 

13 février 2013 3 13 /02 /février /2013 21:16

 

      Vitrail d'abattants de Wc - Le carnet de Jimidi

 

 

Si, comme moi, tu vas lire Belette régulièrement, tu sais qu’elle a lancé un sondage sur la question de savoir qui lisait aux toilettes et pourquoi. (Oui, je mets des liens hypertexte super longs, parce que je me suis aperçu que sinon, tu ne cliquais pas.) Or, dans les commentaires, j’ai trouvé comme une âme sœur en la « personne » de La Renarde : Faute de mieux, elle lit les trucs écrits sur les produits d’entretien et d’hygiène dont ces lieux ne manquent jamais. Du coup, en hommage à La Belette et à La Renarde - tout ça commence à ressembler à une fable - j’exhume ces deux billets, consacrés au PQ et au déo de chiotte.

 

Ô cher auteur inconnu !

 

Ce matin, j’ai une pensée émue pour les auteurs anonymes ayant rédigé toute la littérature discrète qui nous entoure et dont nos objets quotidiens sont les supports patients et résignés.

 

Ainsi, il y a forcément eu quelqu’un pour écrire, je cite : « Papier de toilette très large, super doux et absorbant de QUALITÉ PREMIUM avec une structure 100% pure cellulose. Idéal pour les peaux sensibles avec ses quatre épaisseurs. Son grammage élevé assure un confort, une sécurité, une résistance et une hygiène parfaite. La largeur, la résistance (encore ? Il était dans le maquis ou quoi ?) sa douceur et l’absorption de ce papier en font un papier de toilette luxueux, économique et agréable à l’emploi. Idéal pour une hygiène quotidienne. » fin de citation.

 

Il ou elle a fait des études poussées, voire supérieures, l’université, une grande école… Il ou elle a dû prendre le premier travail qui s’offrait, pour garder sa vieille mère à la maison et la sauver encore quelques semaines du mouroir, ou alors pour se payer un premier avortement à l’étranger. Un petit boulot s’offrait dans cette usine de PQ, l’affaire fut conclue. Ne croyez pas que j’invente. Tout est là, dans le texte. Cet auteur, comme tous les auteurs, à chargé sa plume de lui dessiner un monde meilleur, un monde opposé mot à mot et point par point à son quotidien ordinaire. Pourquoi écrire sinon ? Et là, quand on lit bien, ça fait froid dans le dos. Très large ; donc il ou elle – mais on va dire il – est habillé trop petit ou étroitement logé. Il quitte chaque matin le placard que lui loue à prix d’or un infâme marchand de sommeil pour rejoindre après deux heures de transport dans un bus bondé le placard que lui réserve dans l’usine un infâme marchand de PQ. Super doux ; tu m’étonnes quand sa vie est si dure ! Absorbant ;  en plus, il pleut là où il est. Il doit passer une partie de sa journée à dégouliner. Idéal pour les peaux sensibles ; comme si ça ne suffisait pas, il a de l’eczéma, ou de l’urticaire, ou pire, il fait une allergie à la cellulose. (…) assure un confort, une sécurité ; on mesure là l’étendue de sa précarité inconfortable et moite. Ce petit boulot de merde est tout ce qu’il a, c’est la pierre angulaire de toute sa vie actuelle, sans le PQ tout s’écroule. On comprend qu’il puisse rêver d’une situation plus sereine. Puis deux fois résistance et là, les larmes me viennent presque. Il se demande s’il ne va pas craquer. Ce n’est pas assez de l’environnement hostile, des innombrables circonstances extérieures qui pourraient provoquer sa chute, l'idée atroce lui vient, il est peut-être LUI MÊME le maillon faible. Peut-être a-t-il présumé de ses forces, de sa capacité à endurer le pire ? Alors vite, vite, deux fois résistance à sept mots d’intervalle. Douceur, de nouveau. Il pense à sa vieille mère restée seule au placard, qui n’aura pas trop de sa journée pour lui préparer quelques pauvres frites épluchées péniblement de ses main arthritiques dans des patates soldées et qu’elle cuira pour son retour dans de l’huile rance. Absorption ; encore. Décidément, il pleut beaucoup par là bas. (…) Luxueux, quand je vous disais qu’il rêvait d’absolu. Économique, oui parce qu’en plus, tout ça lui coûte un max : Le loyer du placard, l’abonnement du bus, les bottes en caoutchouc... (Tiens, c’est marrant ce mot : caoutchouc, caoutchouc ! ) Comme tous les travailleurs pauvres, il a l’impression de manquer de tout, mais que le strict nécessaire est quand même trop cher. Agréable à l’emploi ; nous y voilà. Je reconnais bien cette tentation ultime de l’auteur ayant démarré son rêve très haut, brusquement inquiet d’avoir imaginé un monde parfait mais sans la porte. Parce que ce n’est pas le tout de réver minutieusement le paradis, encore faut-il y avoir accès, qu’il n’y ait pas un panneau « déviation » sur sa route, ou un panonceau « complet » punaisé à l’entré. Mais notre auteur y a pensé. Il a eu tout le temps d’y penser dans ses deux fois deux heures de bus bondé dégoulinant. Il sait ce qu’il y a entre la gadoue de son quotidien et ce monde meilleur duquel toute humidité aurait été absorbée. Il ne rêve pas de gagner au loto, ce serait lâche. Quel mérite y aurait-il ? Non, son sésame il le connaît, c’est le TRAVAIL, et c’est cette prière qu’il adresse au ciel, c’est ce message qu’il lance anonymement sur l’emballage de mes rouleaux de PQ, comme l’appel au secours d’un prisonnier injustement détenu dans une cellule pleine de rats, d’araignée et de serpents portant des messages codés ouvrant les cadenas de boites contenant des indices pouvant s’auto-détruire. Le naufragé qu’il est, lance sur sa cellulose un SOS à la mer démontée du capitalisme mondial (Whaaaou !) confiant aux courants capricieux de la grande distribution le soin de… (Ouais, non mais c’est bon, n’en fais pas trop quand même ! - Putain, mais c’est malin, je sais plus où j’en étais maintenant ! - Le paradis, le sésame, le pauvre type coincé dans ses bottes en caout… en polychlorure de vinyle, tout ça… - Ah oui, c’est bon ! Dégage.) et c’est ce qu’il veut, ce qu’il souhaite : un emploi agréable.

 

Cher auteur anonyme n’ayant rien à dire ou presque, je suis content d’avoir échangé ma plume contre votre papier fort grammage quadruple épaisseur et j’ose espérer m’être ainsi fait pardonner de l’avoir utilisé pour l’usage ô combien trivial auquel me conviaient de façon impérieuse mes nécessités intérieures. On a celles qu’on peut.  

 

 

 

On aura reconnu dans cette super production le papier toilette Floralys disponible chez Liddl en paquet de dix rouleaux, dont l’un des mérites est d’être sans chlore et 100% cellulose issue de forêts à gestion durable, comme si j’en avais quelque chose à foutre. Oui, bon, un peu quand même.  

Un autre jour, si j'ai le temps, si vous faites pas trop chier, si j'ai rien de mieux à faire, je persévérerais dans le grandiose avec le très anonyme auteur de l'immortel "Apporte à votre intérieur un parfum et une fraîcheur agréable" de mon aérosol WC.

  

 

 

Toujours plus bas

 

Dans nos tentatives désespérantes pour essayer de toucher le fond de la littérature, pour tenter de trouver l’auteur ultime, celui auprès de qui tous les autres paraîtraient fertiles, nous avons mis la main, dans le grand verbiage de nos objets quotidiens, non loin de l’auteur anonyme des trois lignes d’argument publicitaire imprimés sur l’emballage de nos rouleaux de PQ, sur l’auteur du slogan de notre déo de chiotte : « Apporte à votre intérieur un parfum et une fraîcheur agréables. » Il ajoute non loin : « Le désodorisant W5 Greenwood rafraîchit l’air de votre intérieur. Profitez d’une atmosphère alpine grâce à son parfum de bois de résineux. » Le décor est planté, c’est le caca de le dire.

 

Vous aurez remarqué comme moi qu’on s’appuie à fond  ici sur la fonction. C’était difficile s’agissant du PQ et l’auteur s’en était tiré, de justesse, après avoir tartiné sur la qualité du papier lui-même, par un « Idéal pour une hygiène quotidienne. » très vague finalement, qui laissait entendre qu’on pourrait utiliser son papier pour se démaquiller ou se moucher. Il est vrai que les variations stylistiques à partir de – se torcher le cul – paraissent moins faciles, et mériteraient un talent, ou un salaire qu’il n’avait peut-être pas. Mais notre propos n’est pas d’accabler ce pauvre homme dégoulinant de pluie dans ses bottes, coincé comme nous le savons pour deux heures de trajets quotidiens dans un bus bondé. Manquerait plus qu’il se flingue. L’auteur de notre déo de chiotte, lui, bénéficie d’emblée à la fois de la noble mission consistant à chasser les mauvaises odeurs et de l’espace infini qu’ouvre le parfum dans notre imaginaire. Il le sait et ne s’y trompe d’ailleurs pas, équilibrant son slogan en plaçant parfum d’un côté et fraîcheur de l’autre. Pour le premier, on voit. Nous l’avons déjà dit, un déo de chiotte, ça sert à masquer d’une forte odeur envahissante et fugace une puanteur gênante mais plus discrète. Le déo de chiotte, c’est à la fois un cosmétique et un uniforme d’atmosphère. (1) Ouais, mais parfum, ça fait pas trop rêver. « Apporte à votre intérieur un parfum agréable », on est sur la mauvaise pente du strictement utilitaire. On se rapproche dangereusement du sol, autrement dit du « masque temporairement vos odeurs de merde, de graillon et de baskets décédées ». On ne va PAS TARDER À S’ÉCRASER ALORS FAIT QUELQUE CHOSE, VITE !

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Fraîcheur

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Et hop, t’as vu la manœuvre ? On est reparti d’un mot en altitude. D’ailleurs bouge pas, je branche le pilote automatique : « Profitez d’une atmosphère alpine » et on a maintenant tout le temps de causer. Fraîcheur est bien utile – on vient d’éviter le crash dans la fosse à purin – mais bien intéressant comme mot. Il fait partie des mots complètement positifs, ces mots dont les lettres ont toutes été découpées dans l’enthousiasme d’un ruban de Möbius. Ces mots affichant en permanence un sourire figé, qui de ce fait ne disent plus grand-chose. D’ailleurs, en cherchant bien, nous n’en n’avons trouvé qu’une acception susceptible de fissurer cette béatitude imbécile : « Nous avons été accueillis fraîchement » et encore peut-on croire alors que nos hôtes avaient juste branché la clim. Le déo de chiotte ne fera pas descendre d’un dixième la température de vos toilettes surchauffées par les efforts intenses de vos sphincters et les trois quarts d’heures que vous venez de passer dans cet espace confiné - Chérie ! SORS DE LÀ ou je pisse dans le bouddha en céramique de ta mère ! – mais « fraîcheur » fera mieux. Avec sa copine la couleur verte (Greenwood), elle vous prémunira contre le rouge cuisant de la honte qui pourrait s’emparer de vous à l’idée que le passager suivant puisse être accueilli par vos odeurs de merde. « Ben dis donc ! Je sais pas ce que t’as bouffé hier, mais derrière toi, ça fouette ! » Ça n’arrivera pas. Rhhhh, rhhhh, deux pression sur la tête verte elle aussi du W5 Greenwood et toute trace de vous aura disparu. D’ailleurs vous n’étiez peut-être même pas là. Il semble que le précédent occupant ait été un massif montagneux couvert de résineux au feuillage vert persistant. Vous pouvez désormais sortir la tête haute, très haute même, puisqu’elle baigne désormais dans l’atmosphère. Vous n’êtes plus accroupi(e) mais redressé(e), vous réintégrez l’olympe.

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Deux mots me ravissent encore l’œil dans l’impeccable « Profitez d’une atmosphère alpine » de notre auteur anonyme. Profitez est décidément délicieux. Il procède de cette maximisation bien connue en publicité consistant à parer l’ordinaire des couleurs de l’extraordinaire, bref, à faire prendre des vessies pour des lanternes, mais profitez fait également appel au subterfuge, classique lui aussi, nous faisant miroiter un privilège individuel dans ce qui est, bien sûr, à disposition de tous puisqu’il suffit de l’acheter et de s’en servir. Nous sommes alors invités par l’auteur et son « profitez » à bien davantage que seulement fermer la porte sur deux bouffées de parfum de synthèse expulsées par du butane. Tout ça en un seul mot. Chapeau ! Il est néanmoins tout à fait déconseillé d’en "profiter" plus en vaporisant du Greenwood DES VOTRE ENTREE dans les toilettes ou pire PENDANT TOUTE LA DUREE DE VOTRE SEJOUR. Ça peut même être dangereux si j’en croit les précautions d’emploi que ces rabat-joie du service conformité ont cru bon de rajouter : « Tenir éloigné de sources inflammables. Ne pas fumer. Utiliser uniquement dans des endroits bien aérés. Ne pas inhaler l’aérosol. Lors de l’utilisation, formation possible de gaz/mélange d’air explosifs/inflammables. Ne pas vaporiser vers les yeux. En cas d’accident ou de malaise, consultez immédiatement un médecin (…) ou consulter le centre antipoison (…). » Autant dire que si vous aviez le malheur de vouloir en griller une petite clandestinement en ayant mangé des fayots la veille et que celui d’avant s’était shooté au Greenwood, on risque de ne retrouver que votre cratère.  

Alpine, enfin, me fait jubiler. Il est ici d’un usage comportant un risque, mais courageusement pris par l’auteur et lâchement délaissé par le rédacteur italien, qui se la joue faux-cul et lui préfère « montagne » (Oui, c’est l’avantage des produits vendus chez les hard discounters : on peut en savourer la prose en plusieurs langues.) Le risque est culturel. Si vous ne savez pas que les Alpes sont un massif montagneux, c’est mort. De plus – mais on reconnaît bien là l’artiste, le vrai – l’auteur n’évoque pas les vallée encaissées industrielles et saccagées, ni probablement les cimes enneigées - même si son « fraîcheur » ne les exclut pas totalement comme horizon possible - il parle de ses Alpes à lui, de la vision qu’il en a, des forêts comprises entre 600 et 2000 mètres d’altitude, pas plus bas, guère plus haut. Il parie donc à la fois sur le bon niveau culturel de ses lecteurs et sur leur capacité à partager sa vision. Il fera de grandes choses. Il les a peut-être déjà faites. Je suis impatient de le retrouver sur mon baril de lessive ou mon paquet de céréale.

 

 

(1) Lire à ce propos « L’uniforme cosmétique » du même auteur.

 

 Tu as vraiment écrit un truc titré « L’uniforme cosmétique » ?

 Tu m’a bien regardé ? Qu’est ce que tu veux écrire sous un titre pareil ?

 Je sais pas moi, un développement sur : « Plus on se maquille, plus on s’éloigne de soi-même pour se rapprocher d’images sociales standardisées. »

 Non mais t’as vu où on est ? Tu veux qu’on nous jette des pierres ou quoi ?  

 

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    Vivement que tous nos logement soient accessibles aux handicapés, qu'on puisse se faire livrer les courses par des robots. Ou par des handicapés, d'ailleurs.
  • J’étais tranquillement en route pour aller chez...
    J’étais tranquillement en route pour aller chez Dut quand je me suis avisé que l’aiguille de température d’eau indiquait plus de 100° et flirtait avec la zone rouge. J’ai continué à très petite vitesse jusqu’à un endroit où m’arrêter à l’ombre, avec l’idée...
  • Louons la Vache :
    Louons la Vache : 10 novembre 1966 Jean POIRET, humoriste, chante "Une vache à mille francs", une parodie de la chanson de Jacques BREL "Une valse à mille temps".
  • Non mais, franchement...
  • Je ne m'en lasse pas :
  • "Mais puisque je vous dit que mon attestation...
    "Mais puisque je vous dit que mon attestation d'installation d'un détecteur autonome avertisseur de fumée à BRÛLÉ dans L'INCENDIE provoqué par le fonctionnement défectueux de ce putain de détecteur ! "
  • On me les a demandé : les voilà, les pigeonneaux...
    On me les a demandé : les voilà, les pigeonneaux du balcon. J'avais l'impression que les petits, quelque soit l'espèce, étaient forcément au moins aussi beaux que les parents, voire plus - surtout les miens - mais quand tu vois ce désastre... Encore,...
  • Allo ? Y'a quelqu'un là haut ? Quand je disais...
    Allo ? Y'a quelqu'un là haut ? Quand je disais "on va tous mourir !" Je PLAISANTAIS ! C'est bon ? Tu peux remettre la clim ?