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23 juin 2014 1 23 /06 /juin /2014 23:58

 

 

Deux fois en une semaine, ce n’est plus un heureux hasard, c’est un signe, non ? La première fois, c’était rue Nationale. Tiens ? Un peu après avoir croisé les trois femmes de ma chronique précédente. Je marchais, très absorbé par une tache de la plus haute importance, à savoir me couper les ongles au coupe ongle, quand j’ai entendu qu’on m’apostrophait : « Monsieur Dutey ! » Je n’apprécie pas toujours de me faire apostropher, héler, klaxonné. Ça dépend où, ça dépend qui, ça dépend comment. Mais là, on était Rue Nationale, autant dire dans ZE rue centrale et commerçante de ma petite ville, LA rue dans laquelle on baguenaude justement pour se montrer, se rencontrer, se saluer, échanger deux trois nouvelles. Je me retourne, c’est Sonia et par chance, son prénom me revient tout de suite. Sonia ! (En vrai, elle ne s’appelle pas du tout Sonia, mais on s’en fout.) Qu’est ce que tu deviens ?

 

Question de pure forme, je vois très bien ce qu’elle est devenue : elle est absolument superbe. Dans sa poussette, ce qui ne peut être que son deuxième gamin et, juste à côté de sa mère, ne sachant pas si elle doit me faire la bise ou non, une gamine adorable de sept ou huit ans. Sonia me dit que tout va bien pour elle. Je la complimente pour ses enfants magnifiques, elle me remercie et oui, elle passera le bonjour de ma part à sa mère.

 

 

J’en ai bavé, mais bavé avec elle, tu n’imagines même pas. Je suis entré dans sa vie par la porte d’un cimetière de village dans lequel elle avait trouvé marrant de refaire un peu la déco de deux trois tombes avec une copine. Elle avait quoi ? Quinze ans et c’était… Bouge pas, je calcule… Bon sang ! Y’a au moins douze ans. Son père l’avait adoptée en Afrique où le retenait loin, très loin de sa femme ses « affaires », puis il avait fini par rester à demeure là bas avec une nouvelle compagne, laissant Sonia aux bons soins de son ex. Cette adoption était-elle un projet commun ? Une tentative de sauver ce qui pouvait l’être encore dans ce couple ? Un moyen d’avoir un enfant que la nature leur avait refusé jusque là ? Je n’en sais rien. Je crois même ne l’avoir jamais su. Sonia était chez sa mère, l’une et l’autre également seule, et larguées, mais la gamine bien décidée à lui faire payer l’addition.

 

Dans les gamins qu’on suit, les enfants adoptés sont anormalement surreprésentés. C’est un fait statistique qui ne s’explique pas complètement, mais assez établi pour qu’un peu avant mon arrivée dans ce service, une recherche universitaire menée avec les collègues ait eu matière à s’y intéresser. Perso, j’en ai suivi une bonne demi-douzaine. Des situations cauchemardesques à chaque fois dont une que je tiens pour l’un de mes plus mauvais souvenirs professionnels. Il ne s’agissait pas de Sonia mais d’une intervention ponctuelle au domicile d’un couple en butte avec leur ado fille. Elle, elle parlait de papa, de maman, de ses problèmes avec eux et eux voyait en moi quelque chose comme un service après vente. Ils étaient persuadé qu’il y avait eu tromperie sur la marchandise, au départ. Qu’un vice caché était à l’origine de tous les soucis qu’ils avaient. Ils essayaient sans le dire mais tout en le disant de me présenter leur situation comme bien naturelle , puisque proche, somme toute, du rejet d’un corps étranger. J’en suis encore infiniment triste et en colère rien que d’y repenser.

 

Mais Sonia, c’était autre chose. Très pêchue, la gamine. Indestructible et déterminée, mettant à profit sa belle énergie non au service d’un projet organisé - c’est venu plus tard - plutôt à faire tout ce qui lui passait par la tête. Trop intelligente pour commettre de nouvelles infractions, mais tout le reste y est passé. D’ailleurs, c’est simple, je crois bien me rappeler qu’il y avait des mois entiers durant lesquels personne ne savait où elle était. Moi je faisait ce qu’on fait dans ces cas là : maintenir le lien avec elle, aller la voir là où elle réapparaissait, aller voir sa mère pour lui dire et redire que non, Sonia ne se mettait pas forcément en danger, que oui, il fallait être patiente, que sa fille n’aurait pas seize ans toute sa vie, que là, oui, bien sûr, c’était long, douloureux, inquiétant (Sonia et elle en venaient quasi aux mains quand elles se voyaient) mais que ça allait passer… Bref, le mélange placebo/valium/méthode Coué habituel, en proportion variable selon inspiration du moment.

 

Il semble que ça ait marché. C’est évidemment beaucoup plus grâce à elle qu’à moi.

 

Et donc, la deuxième fois tout à l'heure, alors que je faisais le plein de la voiture de service. « Monsieur Dutey ! Vous me reconnaissez ? » Ben oui. C’est d’ailleurs un des mystères de ce métier, qui pour moi en garde beaucoup : je crois que je reconnaîtrais n’importe lequel des mille gamins que j’ai suivi. En revanche, Salah, son prénom ne m’est revenu qu’un peu plus tard et toute son histoire avec. La famille avait dû quitter l’Algérie précipitamment. Son père, prof d’anglais et maire du village était sur la liste noire des intégristes locaux. Salah avait tout perdu dans cet exil. Là bas, il était le roi du monde, le fils du maire, le premier garçon. Ici : rien et son père moins que rien. Je me rappelle d’autant mieux de Salah qu’il manifestait sa souffrance par un symptôme que je n’ai jamais revu depuis : il perdait ses cheveux. (Oui, mais non : moi, c’est génétique.) Plaques de peau nue sur son crâne. « Qu’est ce que tu deviens ? – Je suis agent de sécurité. J’ai beaucoup de travail. Je me suis marié il y a un mois. Vous vous occupez toujours des petits ?  Ça m’a fait plaisir de vous revoir. »

 

Moi aussi, ça m’a fait plaisir de vous revoir, Salah, Sonia. Ce que vous êtes devenu paye de bien des peines.

 

 

 

18 juin 2014 3 18 /06 /juin /2014 17:15

 

 

 

Comment peut-on être si vieux ? Ce n’est pas à toi que je pose la question : tu es resté(e) tout à fait bien, non, plutôt à moi. Tu dis ? Je suis resté très bien également ? Merci, c’est gentil. N’empêche, je me faisais cette réflexion pas plus tard que tout à l’heure et pas plus loin que Rue Nationale, en croisant trois femmes bras dessus bras dessous, leur trouvant un air de parenté s’expliquant très bien si l’on faisait l’hypothèse que celle du milieu était la fille de sa voisine de droite et la petite fille de celle de gauche. De plus elle était tout à fait en âge d’avoir des enfants. On aurait donc pu imaginer quatre générations réunies. Je ne peux m’empêcher de penser que cette scène, tout à fait ordinaire, signe quand même notre époque. Trois générations marchant d’un bon pas côte à côte, trois femmes que l’âge sépare, mais réunies dans la même promenade et si ça se trouve, la même activité shopping. Les trois, alertes et du moins je leur souhaite, en pleine possession de leurs moyens.

 

Ajoute à ça également que nous mettons la dernière main à un rassemblement familial qui devrait justement permettre de réunir sur la même photo quatre générations, puisque ma fille et sa propre fille vont retrouver leur, respectivement mère et grand-mère, chez ma mère qui, si elle n’est pas la mère de l’une est quand même la grand-mère de l’autre et l’arrière grand-mère de la petite dernière. Oui, je sais, dit comme ça, on n’y comprend rien, mais en vrai, c’est tout à fait simple.

 

 

Reste que nous, les mamys et papy boomer, nés dans la douce euphorie des années soixante ou pas loin, nous allons être à la retraite alors que nos parents sont encore là et bref, il y a de bonne chance que les générations futures soient cernées par des hordes de vieux. Surtout si j’arrête de fumer. 

30 mai 2014 5 30 /05 /mai /2014 15:49

 

 

 

J’entre dans l’immeuble et tombe sur la voisine du 6ème. Quatre vingt ans au bas mot, dépassant à peine de sa canne, elle attend l’ascenseur :

 

-- On ne vous voyait plus ! (Gnnn ? J’entre et sort de cet immeuble deux fois par jour minimum.) Ou alors c’est moi qui sort moins ? (Independance day. La scène où le président des USA débarque dans la base secrète et se fait accueillir par le savant fou, qui lui glisse : « C’est vrai qu’on ne nous laisse pas sortir très souvent. » Ce à quoi il répond : « Je peux comprendre ça. ») Est-ce que j’ai appuyé sur le bouton ? (Elle s’en assure) Oui ! (Elle me montre sa main) Je me suis fait opéré du canal carpien et y’a rien à faire, j’ai beau essayer de remonter mon slip d’une seule main, je n’y arrive pas ! (Dis donc mamie, j’espère que tu ne comptes pas sur moi pour…) Je me suis cassé la jambe, rue de La Ré (comprendre « Rue de la République, ze artère chic de Lyon), ben on est plus vite par terre que remontée ! (Qu’est ce que j’ai en stocke comme réplique à la con…)

 

-- C’est bien vrai ça ! 

28 mai 2014 3 28 /05 /mai /2014 14:32

 

 

 

Journal de M6 l'autre soir : « Les électeurs du Front National ne se cachent plus. » Tiens, je n'avais pas vraiment l'impression qu'avant, ils se cachaient, plutôt qu'on ne voulait pas les voir. Mais admettons. On nous en montre trois. Édith (appelons là Édith), la cinquantaine fatiguée, mariée, sans enfants, habitant Nice. Elle nous expose qu'elle vote FN parce que nos valeurs s'effritent, disparaissent. Chère Édith, le journaliste n'a pas eu la présence d'esprit ou le temps de vous demander ce que vous mettiez exactement sous le mot « valeurs » - je ne vous ferai pas l'injure de croire qu'il s'agissait de votre portefeuille boursier – mais supposons un instant qu'il était question pour vous des valeurs républicaines de Liberté, d'Égalité et de Fraternité, le FN ne les porte pas, bien au contraire. Je peux comprendre votre sentiment que « tout fout le camp », que plus rien ne repose sur rien et bref, votre désarroi, mais confier - comme vous le faites - le soin à d'autres de vous rassurer à bon compte, non.

 

Le deuxième, disons Bernard, brave type dans la quarantaine, habitant Wattrelos dans le Nord : « Je suis obligé d'aller travailler en Belgique, parce qu'ici, y'a plus rien. La Redoute (il cite une ou deux autres entreprises), c'est fini. » sous-entendu : ni l'état ni personne n'a rien fait pour sauvegarder nos emplois. Cher Bernard, je crois que si le capitalisme, ou disons le libéralisme économique pour utiliser un moins gros mot, se souciait d'emploi, depuis le temps, en s'en serait aperçu. Et si vous comptez sur le FN pour re-nationaliser je ne sais quelles entreprises ou secteurs économiques (quoi qu'ils en disent) vous vous trompez d'adresse.

 

Non mais le pire, c'était le troisième. Disons Gérard, éleveur de vaches. Ne me demande pas pourquoi M6 a précisé « de vaches », je n'en sais rien. Une demande de l'intéressé, qui ne voulait pas être assimilé à ces enfoirés d'éleveurs de porc ou ces salauds d'éleveurs de volailles ? La cinquantaine bedonnante, une tête et le reste à la Cabu, mais en vrai. M'est avis que lui, il n'a pas découvert le FN aux dernières européennes. « Vous me dites qu'ici il n'y a pas d'étrangers ? Mais il suffit d'aller à (il cite le chef lieu de canton) et on en voit plein ! Pour ceux là, tant pis, le mal est fait, mais il faut absolument éviter que d'autres arrivent ! » Nous y voilà. Le mal, terme suffisamment vaste pour englober tout ce qui ne va pas – c'est Edith et Bernard qui vont être contents - le mal a ses porteurs désignés, comme autrefois les rats pour la peste. Le mal, c'est l'étranger, pas du tout vague cette fois puisque s'il y a bien une faculté que nous partageons tous, c'est d'identifier en l'autre ce qui nous en différencie et ce qui nous en rapproche. Mais le « ce qui nous en rapproche », là, juste tu oublies et c'est OK.

 

Cher Gérard, on est mal, parce que vous êtes vous-même et forcément l'étranger de quelqu'un ; de votre voisin qui, si ça se trouve, vote à l'opposé de vous ; de l'éleveur de vaches du canton d'à-coté qui, si ça se trouve, rêve de vous racheter, ou de vous faire la peau pour éliminer la concurrence, de l'éleveur de porcs et de l'éleveur de volailles déjà cités ; du maigre qui vous trouve trop gros et c'est vrai que vous êtes gros ; du jeune pour qui vous êtes un vieux con, mais également du vieux pour lequel vous resterez à jamais un blanc-bec. Vous êtes bien sûr l'étranger des sept milliards d'individus qui n'ont pas la chance d'habiter comme vous la France, même si certains sont au final vos clients.

Décidément, le FN apparait comme le remède simple à un malaise diffus. (Ceci dit, ce qui fait décidément mal, dans la période, c'est de voir l'UMP donner avec l'affaire Bygmalion (quel nom à la con) du grain à moudre au « tous pourris » du FN.)

 

 

26 mai 2014 1 26 /05 /mai /2014 21:34

 

Nouveau bureau de Jimidi - Photo 04

 

C’était prévu, c’est fait : j’ai changé de bureau. Mon ex, repeint pour l’occasion pendant mes congés, va être transformé en salle d’entretien. Ça m’a donné l’occasion de le vider complètement. Treize ans de vieux papiers professionnels mis à la benne. Du coup, je passe du nord avec vue sur la rue, au sud avec vu sur un peu de verdure et je gagne une table ronde. 

 

Nouveau bureau de Jimidi - Photo 02

 

Nouveau bureau de Jimidi - Photo 03

 

Nouveau bureau de Jimidi - Photo 01

Oui, bon, pour les vieux papiers, j'ai pas encore tout à fait fini...

 


19 mai 2014 1 19 /05 /mai /2014 07:11

 

 

 

Décidément, y’en a UN, là-haut, qui a un sens de l’humour assez particulier. À moins qu’en ce moment, IL ait des stagiaires. Oui, voilà, ça doit être ça. Je ne peux pas LUI en vouloir. Ce flot incessant de plaintes, de prières, de suppliques, de vœux, de malédictions... Imagine ton mur Facebook alimenté en continu par plus de sept milliard d’amis… Donc cette semaine, IL n’était peut-être pas aux manettes. Non parce que la journée de merde de la semaine, elle était prévue pour jeudi.

 

Je sais. Dit comme ça, ça laisse penser qu’il y a nécessairement une journée de merde dans la semaine. Alors que pas du tout ; elles peuvent être plusieurs et jusqu’à sept d’affilée, mais bref, c’était écrit de longue date sur mon agenda, avec un épicentre précis : jeudi 15 mai, 10h45 - mise en examen d'Elno Ça ne pouvait pas bien se passer puisque une semaine avant, il avait déjà été mis en examen et ça avait tourné à la cata. À peine quinze ans, déscolarisé depuis un an, des dossiers d’incendie volontaire, de vol en réunion... Au moment où la juge m’a donné la parole, je me suis permis d’être un peu inquiet. Du coup, la mère du gamin m’a pris à partie au sortir de l’audience : « Je ne savais pas que vous étiez là pour l'enfoncer ! » Très mauvais moment. De plus, et comme souvent dans les dossiers les plus compliqués, les à-côté foirent aussi. J’avais demandé et obtenu que la Juge prononce une Mesure d’Activité de Jour, pour qu’au moins Elno soit occupée la journée. Première mise en examen : la mesure ne nous était pas arrivée. Deuxième mise en examen : elle nous est arrivée, mais ne désignait pas le bon service et n’était donc pas applicable. Jeudi 15 mai 10h45, j’allais devoir expliquer à la Juge que non, la décision qu’elle avait prise il y a trois semaines n’avait pas été mise en œuvre.

 

Tout pose question, à la veille d’une journée de merde. Tiens, par exemple : vaut-il mieux se coucher plus tôt, ou plus tard que d’habitude ? Plus tôt permettrait d’être frais, dispo et reposé pour mieux en prendre plein la gueule. Plus tard suppose de se réveiller à l’arrache, un peu abruti, mais possiblement dans un état assez second pour qu’une partie des retombée glisse sur soi. J’ai coupé la poire en deux : minuit et demi au lieu de minuit.

 

Ah, pi t’as la somatisation aussi. Perso, j’hésitais entre gastro et lumbago, tous deux parfaitement inutiles puisque peu susceptibles de me clouer au lit. De toute façon, j’y serais allé même en cercueil.

 

Et les signes aussi, bien sûr. Tu sais, ceux qu’on essayer de lire dans tout ce qui passe, tous susceptibles de nous renseigner sur ce qui nous attend. Tu dis ? C’est de la bonne grosse vieille superstition ? Bah oui. Mais pas que. Tu avoueras que savoir s’il va faire beau ou moche au moment fatidique, sans changer la donne sur le fond, ça peut aider. J’avais repéré deux trois signes favorables. Une note, envoyée à la Juge par ma chef à propos de cette ordonnance, demandant qu’elle soit modifiée. Un mail, envoyé par le père d'Elno, m’informant qu'il avait pu être re-scolarisée depuis trois jours. La quasi assurance que la maman ne serait pas là puisqu’il ne s’agissait « que » d’une mise en examen et non d’un jugement. (Apprenant, la fois d’avant, qu’il s’agissait d’une mise en examen - alors qu’elle pensait venir pour un jugement - elle avait ouvertement regretté d’être venue.)

 

Restaient les signes indéchiffrables. Ce jeudi matin là, tout le personnel du service était requis pour participer loin, très loin, à une assemblée générale rassemblant l’ensemble des personnels du territoire. Ça n’arrive jamais ; c’était ce jour là. Ce jeudi matin là, une collègue d’un autre service nous avait demandé de pouvoir disposer d’un bureau pour recevoir un gamin. Ça arrive très peu, mais ce jeudi, oui. Du coup, j’étais sur le pont à 8h30 pour l’accueillir, et voir le service se vider, tout le monde allant à cette assemblée sauf moi. Je suis resté avec cette parfaite inconnue, chacun de nous deux de part et d’autre d’une tasse de café pour elle thé pour moi, à faire la conversation en attendant que ses « clients » arrivent. Et là, autre signe indéchiffrable. Elle, je ne la connaissait pas, mais son service oui : j’y ai travaillé dix ans. Je ne rencontre quasi jamais mes ex-collègue (C’est arrivé deux fois en treize ans) ou des collègues travaillant actuellement dans « mon ex-service », mais ce jeudi, oui. J’avais déjà pris des dispositions mentales pour la planter à 10h30, le temps de monter au tribunal, mais elle comptait prendre un train à 9h40 et c’est exactement ce qu’elle a fait.

 

Je me suis dont retrouvé seul au service pendant une heure, n’ayant rien d’autre à faire que d’attendre qu’il soit l’heure de monter à l’échafaud, bien décidé à ne pas y arriver en avance (pas envie de faire la conversation) mais pas en retard non plus (simple respect). A 10h45, sur place, il n’y avait que l’avocate dans la salle d’attente. A 11 heures, il n’y avait toujours que l’avocate et moi dans la salle d’attente. A 11h05, la juge décidait d’attendre maxi jusqu’à 11h15. Cette absence ne me soulageait pas du tout puisque c’était reculer pour mieux sauter. A 11h10 Elno et son père arrivaient, l’audience se passait paisiblement, la Juge avait préparé « mon » ordonnance modifiée et on sortait du tribunal, pas bras dessus bras dessous mais presque. Tiens ?

 

Etant déjà en ville, j’ai acheté un sandwich pour aller le manger avec mes collègues de mon travail N°2. Bagna dans du pain viennois, délicieux. Un vrai déjeuner « entre filles » : elles étaient déchaînées. Ça m’arrive assez souvent quand je mange au boulot, le 1 ou le 2. Comme les femmes y sont en écrasante majorité, on oublie que je suis là et tant mieux parce que les filles entre elles, c’est pas triste. Un très bon moment donc.

 

On a enchaîné sur une séance d’analyse des pratiques tellement intéressante que je n’ai pas vu l’heure et demie passer puis le gamin que je devais recevoir est venu, puis je suis rentré chez moi sous le soleil et  y’avait l'excellent « The Artist » à la télé en soirée. Alors ?

 

 

Alors le vendredi a été épouvantable. 

 

 


8 mai 2014 4 08 /05 /mai /2014 10:49

 

 

 

 

Je sais bien que ta discrétion naturelle t’interdit de me demander comment s’est terminée la très catastrophique journée d’hier, mais en fait, plutôt bien. En sortant de ce rendez-vous où mon dentiste n’était pas, je suis passé par le distributeur de ma banque retirer 450 euros et non, je ne me suis pas fait dévaliser sur le chemin de La Poste où je suis allé recharger mon autre compte, celui sur lequel j’ai un chéquier. (Il me faut envoyer un chèque de réservation pour le prochain Salon de la Revue). Juste, y’avait une demi-heure d’attente, que j’ai passé plutôt agréablement assis au soleil dehors, constatant encore une fois qu’à Villefranche, il suffit de se poser pour voir passer des gens qu’on connaît : Mme S. la mère de J. qui en a pris pour cinq ans après une série de vols avec violences. Husseyn, dont je me suis occupé il y a quelques années, devenu très jeune homme, en partie grâce à la musculation en prison, Françoise et Chloé, mes deux collègues de boulot N°2, en tenue sportive. Elles revenaient d’une journée acrobranche passée avec les jeunes. J’attendais que le N°231 soit appelé. Tiens ? C’est exactement le numéro qu’occupe encore pour une journée ma brune à l’hôpital. Elle devait sortir hier, puis finalement c’est pour aujourd’hui. Puis le N°231 a fini par s’afficher au tableau lumineux et la liasse de billets de 20 (plus un de 10) a changé de mains.

 

Je suis rentré tranquille pour goûter copieusement de tartines débitées dans le bon pain aux graines acheté en face de La Poste, avant de m’endormir devant la télé. Me suis réveillé vers 20h20 et j’ai juste eu le temps de compléter le goûter avec une salade verte avant que commence « Looking for Eric » sur Arte. Une sympathique bizarrerie, ce film : un Ken Loach qui se termine bien ! Je suis resté près à dégainer la zapette, à la moindre alerte indiquant que tout ça allait tourner à la cata. Non parce qu’avec « Kes » et « Family life » (par exemple), le Ken Loach je le connais comme tout à fait capable de bien donner envie de mourir et hier soir, c’était pas le jour. Puis finalement, alors que tout pouvait basculer dans la tragédie (on passe à deux doigts), le noir vire au rose et c’est tant mieux.  

 

De là, je suis tombé sur l’émission « Une parenthèse inattendue » de Fred Lopez. Tu connais ? C’est toujours bien et parfois, c’est vertigineusement bien. Hier et comme d’hab, trois invités : une chanteuse lyrique, une comédienne et Gérard Lenorman. Hier et comme d’hab, on passe de l’indifférence absolue envers ces peoples qu’on ne connaît pas, ou dont on n’aime pas particulièrement le travail, à une connaissance d’eux qui nous les rend tout à fait proches et sympathiques. À un moment, ils sont dans un grenier, à évoquer leur enfance et l’animateur leur tend un vieux téléphone, en leur demandant d’imaginer qu’ils ont au bout du fil l’enfant qu’ils étaient. Et là, je me suis vu répondre au petit Jimidi d’une dizaine d’année - c’est lui qui appelait - curieux de savoir ce que j’avais à dire des quatre prochaines décennies : 

- Alors ?

 

- Alors, ça va être FORMIDABLE ! 

 

 


7 mai 2014 3 07 /05 /mai /2014 17:05

 

 

 

J’ai passé la journée à corriger in extremis des erreurs plus grosses que moi qui m’avaient échappé dans ce que je rédigeais, à déglinguer le pèse-lettre sur lequel je m’assurais du tarif auquel envoyer mes courriers, à oublier mes clés pour rentrer au bureau alors que j’étais sorti un moment pour, heu, réfléchir, à prendre des rendez-vous chez l’ophtalmo : ce sera pour novembre (on est en mai) et j’avais prévu de terminer cette journée catastrophique en apothéose, avec un rendez-vous chez le dentiste à 17 heures. Sur place, j’apprenais que mon bon Docteur B n’était pas venu au boulot après avoir retrouvé ce matin sa voiture ratatinée et que le véhicule de remplacement prêté par son garage soit tombé en panne. 

 

 

 


7 avril 2014 1 07 /04 /avril /2014 12:17

 

 

 

Je le sais bien : les événements personnels peuvent singulièrement influer sur ce qui nous arrive et qu’on perçoit. L’exemple que je prends volontiers est celui-ci : Quand ta femme, ta fille, ta mère te dit qu’elle attend un bébé, ça y est, tu vois des femmes enceintes partout (surtout si les trois t'annoncent ça en même temps) alors que la veille, tu aurais juré ne pas en avoir vu depuis au moins… disons neuf mois !

 

Et comme ma chérie est à l’hôpital depuis quatre jours, trois heures et quarante cinq minutes, sans doute suis-je un peu plus réceptif à certaines infos. Mais quand même : je me suis bel et bien cassé une dent (encore !) sur l’aile de poulet d’hier soir. Très étrange impression, de flanquer un bout de soi-même à la poubelle avec les restes d’une autre carcasse. Ce matin : Le fils de la secrétaire a la cheville dans le plâtre pour quinze jours au moins, depuis son entorse d’hier ; un des gamins de la chef a démarré une pharyngite cette nuit ; la gamine de l’assistante sociale garde ce lundi le lit pour une gastro.

 

La tête pleine de trou de la sécu, je me mets en route pour une visite assez loin sur mon secteur quand à l’entrée d’un village, vision d’horreur : un chat qu’une voiture vient de percuter, ses tripes à moitié répandues et sa queue encore en train de battre le macadam. 

 

Arrivé chez Monsieur B. j’ai pensé que « ça allait se calmer ». Après tout, je venais, comme prévu, leur dire que ce serait ma dernière visite ; la mesure judiciaire arrive à échéance. C’était compter sans son café. Je ne sais pas quelle nitroglycérine il met là dedans, mais ça doit être de la bonne. Me suis senti devenir parkinsonien à la première gorgée. C’était également compter sans G. le fils de la maison, qui a mis à profit cette dernière visite pour essayer d’en obtenir d’ultimes bénéfices secondaires, sur le mode : « Je veuuuuux un scooteeeeer ! » Père et fils ont failli en venir aux mains. Je le laisse imaginer dans quel état je suis rentré au bureau, avec la faim croissante, le café s’essayant au trampoline dans mon estomac, le conflit dont j’avais bien vu s’allumer la mêche et bien sûr, ma dent toujours cassée et ma chérie toujours à l’hôpital depuis quatre jours, quatre heures et neuf minutes.

 

Tu dis ? C’est comme ça, y’a des périodes compliquées, de tuiles, de poisse, de hasards malencontreux, de malchance.

 

Merci, j’étais au courant. Du coup, ça me ferait plaisir que tu me dises que pour toi, tout va bien. Mais tu sais ce qui m’intrigue le plus, là dedans ? C’est le chat. Oui, le chat moitié écrasé de tout à l’heure. Il était noir.

 

 

Et alors ? Non mais tu le fais exprès, ou quoi ? Le chat noir est un très ancien et très universel signe de mauvais augure. Mais quand on croise un mauvais présage qui, à l’évidence, vient de vivre de très mauvais moments (les derniers d’ailleurs) c’est bon ou pas ? 

 


10 février 2014 1 10 /02 /février /2014 12:29

 

 

 

« Que d'eau ! » me lance la voisine du dessus, rentrant chez elle planquée sous son parapluie, alors que j'étais en train de fumer réfléchir sur le perron menant au bureau, abrité de la douche par l'auvent de béton. Elle enchaîne, en cherchant ses clés : « Pi c' est pas de la petite pluie, c'est du gros débit !

- Tout le monde est sous l'eau, je lui dis, ayant en tête les images des inondations en cours et la carte de vigilance rouge de celles annoncées.

Elle trouve ses clés ; on convient qu'on n'est pas les plus mal lotis puisque nous, au moins, on n'a pas un mètre cinquante de flotte chez nous.

 

C'est le plus long dialogue qu'on ait eu en treize ans. Comme quoi, la météo, à l'ordinaire, ça permet de causer, mais pour peu qu'un phénomène météorologique un peu exceptionnel s'abatte, ça fait exceptionnellement causer. J'ai des souvenir de transport en commun certains jours de neige : tout le monde était pote.

 

On penserait à tort que la météo offre une inépuisable source de sujets consensuels et non polémiques. Oui, mais non. Parler de la pluie et du beau temps permet effectivement de parler quand on n'a rien à dire (et c'est exactement ce que je suis en train de faire ; j' expliquerai peut-être pourquoi dans quelques lignes) ou d'éviter certains sujet ( là, non.) mais ce faisant, c'est bien pour râler, se plaindre, maudire, déplorer, se lamenter. Même s'il fait beau, on bascule alors en mode : « Ben c'est pas trop tôt ! On a failli attendre ! Après le printemps, été, automne, hiver pourri qu'on a eu, (barrer la mention inutile) ! » pour conclure qu'il n'y a plus de saison, même et justement quand il y en a, puisque rien n'interdit alors de prendre la neige comme une attaque personnelle, la canicule comme une agression à nous seule destinée et les inondations comme une tuile supplémentaire prouvant à l’évidence que Dieu nous en veut tout particulièrement, après la panne de machine à laver et la facture de garage. 

 

J'ai infiniment de compassion pour nos concitoyens actuellement en train de subir des inondations, et c'est pas fini, mais on ne m'en voudra pas trop de sourire à moitié de la tonalité de certains titres relevés dans les médias à propos des catastrophes naturelles de cette mi-février 2014, genre : « Inondations : la Bretagne en a marre ! » L'info, ce n'est plus les crues, c'est le sentiment d'exaspération de leurs victimes. Un peu comme si, de toi à moi, en passant par toi, toi et même toi, cette plainte mi-agacée, mi-stupéfaite que provoque volontiers la météo, quelque elle soit, avait fini par grossir, s'alimenter des plaintes voisines et déborder de son cours naturel pour aller imbiber la une de nos journaux : Le ras-le-bol est en crue.

 

On devine la politique pas loin derrière, avec le flot de chômeur en crue lui aussi, malgré les promesses faites, la croissance desséchée, la criiiise qui colle aux godasses et bref, sous couvert de noyer le poisson en parlant du temps pour ne pas parler d'autre chose, on sent quand même poindre la tentation d'agréger les mécontentements assez haut, assez costaud pour faire du seul « Y'en a marre » un événement en soi, avec son étiquette assez adhésive pour coller au tout et n'importe quoi. Puis il faudra passer de l'étiquette au bulletin de vote et ça tombe bien (si je puis dire), on a ici les municipales dans quelques semaines. On demandera au sortir des urnes pourquoi Monsieur ou Madame Toutlemonde n'a pas reconduit son maire (les deux tiers se représentent), je ne serai pas surpris d'apprendre que non, on n'a pas voté pour lui, parce qu'il n'a pas empêché les inondations.

 

Tu dis ? Pourquoi la météo, alors ? Parce que ma semaine de vacance a été ainsi rythmée qu'après m'être sur-occupé pour tourner la page de mes (pré)occupations professionnelles, je me suis retrouvé hier dimanche, un peu hagard (pour ne pas dire abruti), en pleine sécheresse devant mon aquarium, mon écran, mon paysage de balade, l'esprit plus sec qu'un oued, quasi impatient de reprendre le travail. La voisine a dû le sentir.

 

 

 


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