est fou ça ! Je reçois aujourd’hui deux témoignages, différents, ayant trait à des violences exercées sur le Net par des internautes sur d’autres, ou plutôt par un internaute sur un autre, car la violence sur la toile a de nombreux points communs avec celles qui opposent parfois deux automobilistes : ils se mettent sur la gueule et tout le monde s’en fout. L’autre point commun, aussi fascinant qu’inquiétant, c’est de constater qu’à bord de leur voiture ou de leur ordi, les gens, vous, moi, tout le monde, peut manifester des comportements tout à fait inhabituels, dont personne ne les aurait pensé capable. Ça marche dans les deux sens, c’est à dire que vous, moi, tout le monde peut se retrouver soit bourreau, soit victime et se demander sans comprendre ce qui lui arrive. D’ailleurs non. Seule la victime se demande ce qui lui arrive, le bourreau, lui, par définition, est sûr de son bon droit. Il ne harcèle pas, il me menace pas, il n’insulte pas, il ne censure pas : il répare l’injustice qui lui a été faite, dont le prix sera rien moins que l'annihilation totale de sa victime, tous les moyens étant alors bons, et justes.
Perso, la dernière fois, c’était à l’occasion d’un jeu littéraire sur un blog que je n’ai plus envie de citer - manquerait plus que ça - Le principe du jeu était assez simple : les animatrice du blog mettaient en ligne une photo et les internautes étaient invités à écrire à partir d’elle, les deux animatrice se chargeant ensuite d’en assurer la publication sur leur blog. J’écris un premier texte sur une première photo, mon texte parait, pas de problème. J’écris un deuxième texte sur une deuxième photo, mon texte parait, pas de problème. Puis la date limite de ce dernier jeu ayant été atteinte, les organisatrices publient la liste des auteurs ayant participé, dans laquelle, tiens ? je ne figure pas. Puis je m’aperçois que mes deux textes ont été virés. J’essaye de joindre les animatrices sur le carnet lui-même, pour savoir ce qui se passe : pas de réponse. Par courriel : pas de réponse non plus.
Je n’ai aucune raison de douter, a priori, des qualités humaines des deux animatrices concernées. D’ailleurs, lancer de façon désintéressée un jeu littéraire laisse penser qu’il s’agit de personnes comme vous et moi, c’est à dire très bien. Elles se sont néanmoins conduites de façon parfaitement dégueulasse.
On se sent très seul dans ces situations. Pour essayer de ne pas le rester tout à fait, j’ai bien sûr parlé de cette censure sur mon blog de l’époque - j’en profite pour remercier une nouvelle fois ceux et celles qui m’ont témoigné alors un peu de sympathie - mais profitant de ce que la liste des auteurs ayant participé au jeu était publiée, donc publique (quoiqu’incomplête, on l’aura compris) j’ai entrepris de leur écrire à tous un petit mot, par la voie d’un commentaire sur leur carnet.
Passionnante expérience ! Je crois bien que c’est à cette occasion que j’ai fait connaissance avec Br’1 et ses chroniques toulousaines, ce qui tendrait à prouver qu’ « À quelque chose, malheur est bon. » Mais c’est l’exception. Témoignant de la violence qui m’avait été faite, en termes mesurés - il s’agissait avant tout d’informer - je vous dis pas ce que j’ai ramassé en retour ! D’ailleurs si, je vais vous le dire.
J’ai eu de l’indifférence polie sur le mode : Oui, bon, mais en fait, on s’en fout. J’ai eu de l’indifférence agressive, sur le mode : Fous moi la paix, j’ai déjà assez à faire avec mes propres emmerdes. J’ai eu pas mal de suspicion, sur le mode : Y’a pas de fumée sans feu. Mais le plus étonnant - je n’en reviens toujours pas - ça aura été pour moi de constater qu’une internaute, même pas l’une des deux animatrices du site, me suivait à la trace de blog en blog pour doubler mon commentaire d’un des siens sur le mode « N’écoutez pas ce connard, tout ce qui l’intéresse, c’est de faire du mal. » Je ne lui en veut pas, elle et moi sommes passés à autre chose. C’est juste pour illustrer cette idée que la violence, froissement d’aile ou d’égo, fait sortir les gens d’eux-mêmes affublés d’un masque grimaçant, toutes griffes dehors et la batte à la main, au point que personne ne les reconnaît plus, même pas eux.
Que faire ? Aucune idée. On voit bien qu’il faudrait pouvoir pardonner, mais cette violence perverse laisse le bourreau persuadé que ce serait à sa victime de lui demander pardon. Faire appel à un tiers ? Encore faudrait-il en trouver un dans la débandade générale, et que sa médiation soit acceptée par les deux parties. Reste à s’indigner, à manifester son désaccord au bourreau et sa solidarité à la victime. Ce n’est pas grand-chose, mais quoi d’autres ?